Marc 13, 20
Et si le Seigneur n’abrégeait pas le nombre des jours, personne n’aurait la vie sauve ; mais à cause des élus, de ceux qu’il a choisis, il a abrégé ces jours-là.
Et si le Seigneur n’abrégeait pas le nombre des jours, personne n’aurait la vie sauve ; mais à cause des élus, de ceux qu’il a choisis, il a abrégé ces jours-là.
Et si le Seigneur n’avait abrégé ces jours…
Le verbe que le Nouveau Testament n’emploie qu’ici et dans le passage parallèle de Matth. 24, 22, a le sens
de « amputer ». Cf. 2S 4, 12, dans la traduction des Septante. Mais, comme le verbe hébreu מער, « couper
avec une faux » (Ps 102 hébr.), il se dit au moral du temps qu’on abrège. — Aucune chair n’aurait été
sauvée. Si Dieu, dans sa pitié, n’eût abrégé le temps du siège de Jérusalem, aucun Juif n’aurait survécu à tant
d’horreurs et de misères. Cette « abréviation » miséricordieuse se manifesta de deux manières, d’une part
dans les mesures actives et vigoureuses des assiégeants, d’autre part dans la folle confiance et les guerres
intestines des assiégés. Elle eut lieu à cause des élus, en vue des chrétiens que Dieu voulait sauver. — Qu’il
a choisis. Nouvelle répétition, semblable à celle du v. 19.
Ou bien, «l'abomination de la désolation», c'est l'entrée des ennemis par violence dans la ville.
Notre-Seigneur dit: «Ceux qui sont dans la Judée», parce qu'en effet les Apôtres n'étaient pas alors dans la Judée, et bien longtemps avant la guerre, ils avaient été obligés de quitter Jérusalem.
Je crois que le Sauveur fait ici allusion aux mères qui mangèrent leurs enfants, car la famine et la peste les amenèrent à cette cruelle extrémité contre le fruit de leurs entrailles.
Afin que la rigueur de la saison ne s'oppose point à votre fuite. Quels seront les graves motifs qui les réduiront à cette triste nécessité de fuir? «Car l'affliction de ce temps-là sera si grande, que depuis le commencement de la création de l'univers jusqu'à présent, il n'y en eut jamais de pareille».
La Glose
Après avoir décrit les signes précurseurs de la destruction de la ville de Jérusalem, Notre-Seigneur prédit les circonstances qui doivent l'accompagner: «Lorsque vous verrez l'abomination», etc.
Ou plutôt ils en étaient sortis par une inspiration de l'Esprit saint: «Que celui qui sera sur le toit, ne descende pas dans sa maison, et n'y entre point pour en emporter quelque chose», car il serait mille fois désirable de pouvoir échapper, même dépouillé de tout, à une si grande tribulation.
A ces deux obstacles à leur fuite tirés l'un du désir d'enlever les objets qui leur appartenaient, l'autre, de la difficulté de porter leurs enfants, Notre-Seigneur en ajoute un troisième, celui du temps: «Priez Dieu que ces choses n'arrivent point durant l'hiver».
Lorsque l'Esprit saint nous invite à l'intelligence du texte sacré, c'est une preuve qu'il renferme un sons spirituel. Or, on peut entendre cette abomination, ou de l'Antéchrist, on de l'image de César, que Pilate plaça dans le temple, ou de la statue équestre d'Adrien, qui demeura longtemps dans le saint des saints, en effet, le mot abomination dans le langage de l'Ancien Testament est souvent synonyme d'idole ( Dt 7, 25; 4 R 23, 16; Ez 7, 20). Il ajoute: «De la désolation», parce que ces idoles ont été placées dans le temple désert et désolé.
Cette prédiction, l'histoire ecclésiastique en fait foi, fut littéralement accomplie, lorsqu'aux approches de l'armée romaine et de la ruine du peuple juif, tous les chrétiens avertis par un oracle venu du ciel, s'éloignèrent de la Judée, passèrent le Jourdain, et se retirèrent pour un temps dans la ville de Pella, sous la protection d'Agrippa, roi des Juifs, dont parlent les Actes des Apôtres ( Ac 25; 26), et qui avec la partie de la nation juive qui consentait à reconnaître son autorité, restait toujours soumis à l'autorité de l'empire romain.
Celles dont le sein ou les bras chargés du fardeau de leurs enfants, pourront difficilement trouver leur salut dans la fuite.
Ou bien encore, tout ce qui suit à commencer de ces paroles: «L'affliction de ce temps-là sera si grande», etc., se rapportent, dans leur sens propre, au temps de l'Antéchrist, où non-seulement les chrétiens auront à souffrir des tourments plus nombreux et plus cruels, mais ou, chose déplorable, l'éclat des prodiges semblera justifier la conduite des persécuteurs.
Or, plus cette dernière tribulation l'emportera par l'étendue des épreuves sur toutes celles qui ont précédé, plus aussi elle sera limitée dans sa durée; car, autant que la prophétie de Daniel et l'Apocalypse de saint Jean permettent de le conjecturer, l'Eglise répandue par toute la terre sera persécutée pendant trois ans et demi ( Dn 12, 11; Ap 13, 15). Dans le sens spirituel, «lorsque nous verrons l'abomination de la désolation établie où elle ne doit pas être», c'est-à-dire, les hérésies et les crimes régner parmi ceux qui paraissaient consacrés aux divins mystères, «alors nous tous qui sommes dans la Judée»,c'est-à-dire, qui persévérons dans la confession de la vraie foi», nous devons d'autant plus nous efforcer de nous élever au sommet des vertus, que nous en voyons un plus grand nombre suivre les sentiers du vice.
Alors que celui qui est sur le toit, c'est-à-dire, qui s'est élevé par l'esprit au-dessus des oeuvres charnelles, ne redescende pas dans les actions basses de sa vie première, et qu'il ne rouvre pas son coeur aux désirs de la chair et du monde, car notre maison, c'est ou ce monde, ou la chair que notre âme habite.
Si l'on entend ces paroles de la consommation des siècles, nous dirons alors que Jésus-Christ nous recommande de ne point laisser refroidir notre foi en Jésus-Christ et notre charité pour lui, comme aussi de ne point cesser de pratiquer les bonnes oeuvres, et de ne point nous livrer au repos du sabbat dans l'exercice des vertus.
Saint Matthieu dit: «Etablie dans le lieu saint». Saint Marc se sert d'une expression différente, mais le sens est le même. Pourquoi dit-il, en effet: «établie où elle induit pas être ?» parce qu'elle est dans le lieu saint d'où elle devrait être à jamais bannie.
Saint Luc, pour nous apprendre que cette abomination de la désolation eut lieu lors du siège de Jérusalem, rapporte en ce même endroit les paroles du Sauveur: «Quand vous verrez Jérusalem entourée par des armées, sachez que la désolation de cette ville est proche» ( Lc 21, 20). «Alors que ceux qui sont dans la Judée fuient vers les montagnes».
Josèphe, qui a écrit l'histoire des Juifs, nous rapporte une multitude de faits inouïs qui précédèrent la ruine de ce peuple, et qui paraissent à peine croyables, ce qui justifie ces paroles du Sauveur, que jamais depuis la création on n'a vu, que jamais on ne verra de tribulation semblable. Peut-être, la tribulation qui doit éclater lors de la venue de l'Antéchrist, égalera, surpassera même celle-ci, mais quant au peuple juif, il est vrai de dire que jamais il n'en existera de semblable, d'ailleurs, si les Juifs doivent être les premiers et les plus empressés à recevoir l'Antéchrist, ils seront bien plutôt les auteurs que. les victimes de cette tribulation.
Le seul refuge contre de si grands maux, c'est que Dieu qui donne la force de supporter la persécution, mettra un terme à la puissance des persécuteurs: «Que si le Seigneur n'avait abrégé ces jours», etc. - Théophyl .. C'est-à-dire, si la guerre des Romains n'avait été de courte durée, nul homme n'eût été sauvé, c'est-à-dire, aucun juif n'eût échappe. Mais à cause des élus qu'il a choisis (c'est-à-dire, des Juifs qui avaient déjà embrassé, ou qui devaient embrasser la foi), Dieu abrégea ces jours, et mit promptement fin à la guerre, car Dieu savait qu'après la ruine de Jérusalem, un grand nombre de Juifs croiraient en Jésus-Christ, et c'est en leur faveur que la nation juive ne fut pas entièrement détruite.
Je regarde comme plus probable l'interprétation de certains auteurs, d'après lesquels les jours seraient pris ici pour les calamités elles-mêmes, de même que nous voyons dans plusieurs autres endroits de l'Ecriture, l es jours appelés mauvais ( Gn 47, 9; Ps 93, 13; Ep 5, 16); car ce ne sont pas les jours qui sont mauvais, mais les événements qu'ils voient s'accomplir. Ces jours donc seront abrégés, dans ce sens que Dieu donnera la force nécessaire pour sentir moins vivement le poids de ces calamités, et leur ôtera ainsi ce qu'ils auront d'excessif et d'insupportable.
Fuir sur les montagnes, c'est ne point descendre des hauteurs où l'on s'est élevé.
«Priez Dieu, dit Notre-Seigneur, que votre fuite n'ait point lieu en hiver, ou le jour du sabbat», c'est-à-dire, priez que les fruits de vos oeuvres ne passent pas avec le temps; en effet, l'hiver est la saison où finissent les fruits, et le sabbat est la figure de la fin des temps.
Cette tribulation sera grande, et sa durée abrégée, à cause des élus, de peur que le mal du temps ne vienne changer leur esprit ( Sg 4 ).