Luc 6, 42

Comment peux-tu dire à ton frère : “Frère, laisse-moi enlever la paille qui est dans ton œil”, alors que toi-même ne vois pas la poutre qui est dans le tien ? Hypocrite ! Enlève d’abord la poutre de ton œil ; alors tu verras clair pour enlever la paille qui est dans l’œil de ton frère.

Comment peux-tu dire à ton frère : “Frère, laisse-moi enlever la paille qui est dans ton œil”, alors que toi-même ne vois pas la poutre qui est dans le tien ? Hypocrite ! Enlève d’abord la poutre de ton œil ; alors tu verras clair pour enlever la paille qui est dans l’œil de ton frère.
Louis-Claude Fillion
Comp. Matth. 7, 3-5 et le commentaire. Les deux rédactions coïncident presque littéralement en cet endroit, surtout dans le texte grec. - Pourquoi vois-tu... ? Dans le grec, vois suppose un regard attentif et prolongé ; sans apercevoir... : s'emploie surtout au moral pour désigner un retour de l'âme sur elle-même ; tu verras comment... : ici, le sens est voir clairement, distinguer nettement d'un bout à l'autre, complètement. Ces trois verbes font image et sont d'un bel effet dans ce petit drame ironique, admirablement décrit. Jésus ne pouvait inculquer avec plus de force la règle de sagesse pratique qui se dégage si clairement des vv. 41 et 42.
Saint Théophylacte d'Ohrid
Ou encore, si vous jugez les autres, et que vous soyez coupable des mêmes fautes, ne ressemblez-vous pas à l'aveugle qui conduit un autre aveugle? Comment le conduirez-vous au bien, alors que vous suivez la voie du mal? Le disciple n'est point au-dessus du maître. Si donc vous ne savez éviter le péché, vous qui vous décernez le titre de maître et de conducteur, que deviendra celui qui devient votre disciple et se place sous votre conduite? Car tout disciple sera parfait, s'il est comme son maître.

Le Seigneur ajoute une autre parabole qui a le même objet: «Pourquoi voyez-vous une paille (c'est-à-dire une faute légère dans l'oeil de votre frère), tandis que vous n'apercevez pas la poutre, (c'est-à-dire les fautes énormes) qui sont dans votre oeil ?»

Cette leçon s'adresse à tous, mais surtout aux docteurs qui punissent sévèrement, dans leurs disciples, les moindres fautes, tout en s'accordant le bénéfice de l'impunité pour les plus grandes; c'est ce qui leur attire de la part du Seigneur le reproche d'hypocrisie, parce qu'ils jugent sévèrement les péchés d'autrui pour faire ressortir leur propre justice: «Hypocrites, ôtez d'abord la poutre de votre oeil», etc.
Saint Bède le Vénérable
Ou bien le sens de ces paroles dépend des enseignements qui précèdent, où Notre-Seigneur recommande de donner l'aumône et de pardonner les injures. Si vous vous laissez aveugler par la colère contre celui qui vous fait violence, et par l'avarice à l'égard de celui qui vous demande du secours, comment, dans cette disposition coupable de votre âme, pourrez-vous les guérir de leurs propres vices? Voyez Jésus-Christ, notre Maître; il était Dieu, il pouvait venger les injures qui lui étaient faites, et cependant il a préféré adoucir la fureur de ses ennemis en les supportant avec patience; n'est-il donc pas nécessaire que ses disciples, qui ne sont que des hommes, suivent la même règle de perfection.

Cette comparaison fait suite à la précédente, où le Sauveur nous déclare qu'un aveugle ne peut servir de guide à un autre aveugle, (c'est-à-dire qu'un pécheur ne peut être repris par un autre pécheur); Notre-Seigneur ajoute donc: «Comment pouvez-vous dire à votre frère: Mon frère, laissez-moi ôter la paille de votre oeil, vous qui ne voyez pas la poutre qui est dans le vôtre ?»
Saint Cyrille d'Alexandrie
Notre-Seigneur ajoute aux enseignements qui précèdent une parabole bien nécessaire: «Il leur faisait aussi cette comparaison». En effet, ses disciples étaient appelés à devenir les docteurs du monde; ils devaient donc connaître toutes les règles d'une vie sainte, et répandre les clartés d'une lumière toute divine, pour éviter d'être des aveugles servant de guide à d'autres aveugles. Il leur dit donc: «Un aveugle peut-il conduire un autre aveugle ?» S'il arrive à quelques-uns d'atteindre au même degré de vertu que ceux qui les enseignent, qu'ils se contentent de cette mesure, et marchent toujours sur les traces de leurs maîtres; car, dit Notre-Seigneur: «Le disciple n'est pas au-dessus du maître». Aussi saint Paul dit aux Philippiens: «Soyez mes imitateurs, comme je le suis de Jésus-Christ» ( Ph 3,17 ). Pourquoi donc voulez-vous juger les autres, alors que Jésus-Christ ne juge pas? Car il n'est pas venu pour juger le monde, mais pour le sauver ( Jn 3 ).

C'est-à-dire: Comment celui dont la conscience est chargée de crimes énormes (figurés par la poutre) peut-il condamner celui qui n'en a que de légers, ou même qui n'en a aucun à se reprocher? car c'est ce que la paille signifie.

C'est-à-dire purifiez-vous d'abord de ces crimes énormes qui souillent votre conscience, et alors vous pourrez vous montrer zélé pour corriger votre frère de ses fautes légères.
Saint Augustin
Ou bien encore, Notre-Seigneur, par ces paroles: «Est-ce qu'un aveugle peut conduire un autre aveugle ?» veut leur ôter l'espoir de recevoir des lévites cette mesure dont il a dit: «Ils verseront dans votre sein», etc. En effet, ils payaient les décimes à ceux que le Sauveur appelle des aveugles, parce qu'ils ne recevaient pas l'Évangile. Il veut donc que le peuple commence à attendre cette récompense des disciples du Seigneur, qu'il déclare être ses imitateurs en disant: «Le disciple n'est point au-dessus du maître».
Saint Basile le Grand
La connaissance de soi-même est en effet de la dernière importance; l'oeil qui considère les choses extérieures, ne peut voir ce qui se passe en lui-même; ainsi en est-il de notre esprit, lorsqu'il est prompt à juger les péchés d'autrui, il devient lent à découvrir ses propres défauts.