Luc 3, 2
les grands prêtres étant Hanne et Caïphe, la parole de Dieu fut adressée dans le désert à Jean, le fils de Zacharie.
les grands prêtres étant Hanne et Caïphe, la parole de Dieu fut adressée dans le désert à Jean, le fils de Zacharie.
Sous les grands prêtres Anne et Caïphe. Anne, fils de Seth, appelé par Josèphe Ananus, fut promu grand prêtre par Quirinus, gouverneur de Syrie, l’an 7 de notre ère. Au commencement du règne de Tibère, en l’an 14 (15 ?), il fut déposé par Valerius Gratus, procurateur de Judée et remplacé par Ismael, fils de Phabi. Bientôt après, Eléazar, fils d’Anne, reçut le souverain pontificat, qu’il dut céder l’année suivante à Simon, fils de Camith. Ce dernier fut remplacé par le gendre d’Anne, Joseph Caïphe, qui conserva cette dignité de l’an 27 ou 28 à l’an 36 ou 37. Anne vécut longtemps et cinq de ses fils furent tour à tour grands prêtres. Les Evangélistes l’ont nommé avec Caïphe, soit parce qu’il était son sagan ou vicaire, comme quelques-uns l’ont pensé, soit qu’il fut encore alors président du sanhédrin ou bien qu’ayant exercé les fonctions du souverain pontificat, il en portât encore le titre par honneur. Il devait, en tout cas, jouir d’une grande influence à Jérusalem, et en particulier auprès de Caïphe, son gendre.
6° Sous les grands prêtres… Après avoir signalé les hommes qui
exerçaient l'autorité civile en Palestine quand S. Jean inaugura son ministère public, S. Luc mentionne aussi
ceux qui, dans le même temps, étaient maîtres du pouvoir religieux à Jérusalem. Mais la manière dont il le
fait a créé une difficulté d'exégèse assez sérieuse. 1° Personne n'ignore que, dans la religion mosaïque, il n'y
avait jamais deux grands prêtres à la fois. 2° De plus, à l'époque dont parle notre évangéliste, Anne avait
cessé depuis de nombreuses années d'être le pontife suprême des Juifs, puisque, élevé à cette dignité l'an de
Rome 759, il avait été déposé en 767 par le procureur Valérius Gratus. On a imaginé différentes hypothèses
pour expliquer ce semblant d'inexactitude. 1° Anne et Caïphe auraient géré alternativement, d'année en
année, le souverain Pontificat. Comp. Joan. 11, 49, 51 ; 18, 13 et le commentaire ; 2° Anne aurait été le
Sagan, c'est-à-dire le substitut du grand-prêtre Caïphe : ou bien 3° il aurait rempli les fonctions de Naci ou de
président du Sanhédrin, ce qui lui eût conféré une grande autorité au point de vue religieux. Mais ces
conjectures sont bien peu fondées. Nous aimons mieux supposer avec plusieurs commentateurs
contemporains 4° que S. Luc, peut-être avec une légère pointe d'ironie, a voulu décrire ainsi le véritable état
des choses, c'est-à-dire montrer que l'exercice du sacerdoce suprême était alors beaucoup plus entre les mains
d'Anne qu'entre celles de Caïphe ; ou 5° que l'on continuait à donner à Anne le titre honorifique de
grand-prêtre, bien que Caïphe fût le vrai titulaire ; ou enfin 6° que, dans l'opinion générale, Anne était
regardé malgré sa destitution comme le pontife de droit, puisque, d'après la loi juive, le souverain pontificat
était à vie : Caïphe n'eût été alors que le grand-prêtre de fait. Voyez Act. 4, 6 et le commentaire. Josèphe, Ant.
20, 20, applique aussi à Anne le titre de Pontife ; S. Luc ne saurait donc être taxé d'erreur pour avoir employé
cette même expression. Cfr. Wieseler, Beitraege, pp. 205 et ss. Sur Caïphe, voyez l'Evang. selon S. Matth. p.
492. - A tous les noms que l'évangéliste vient de citer se rattachaient pour le peuple juif, sous le double
rapport moral et politique, les misères les plus profondes. Comme Israël avait alors besoin de pénitence et de
rédemption ! - La parole du Seigneur se fit entendre. Formule majestueuse, pour exprimer les
communications divines faites aux prophètes. Comp. 3 Reg. 17, 1 ; Is. 38, 4, 5 ; Jer. 1, 2 ; Ezech. 1, 3 ; Os. 1,
1 ; Jon. 1, 1, etc. Elle désigne ici le moment solennel où Dieu fit entendre à Jean-Baptiste qu'il était temps de
quitter son désert (cfr. 1, 80), et d'aller préparer les voies au Messie. - A Jean. Les noms de Tibère, de Pilate,
des tétrarques et des grands-prêtres n'avaient donc pour but que d'introduire celui du fils de Zacharie ! Pour
justifier un si grand appareil l'événement paraît tout d'abord bien petit : mais qu'étaient, en comparaison de
Jean-Baptiste, tous les dignitaires de l'empire romain et des pays juifs ?
Pendant tout le temps qui s'écoula depuis son enfance jusqu'au jour où il devait paraître en Israël, il demeura caché dans le désert, et l'Évangéliste ajoute ici: «Dans le désert»; pour détourner jusqu'à l'ombre du soupçon que les liens du sang ou d'une amitié contractée dès l'enfance portaient Jean-Baptiste à rendre témoignage à Jésus. Aussi le saint Précurseur nous assure-t-il expressément qu'il ne le connaissait pas ( Jn 1).
Tous deux étaient grands-prêtres lorsque Jean commença sa prédication, mais Anne exerçait le souverain pontificat cette année-là même, Caïphe, l'année même où Notre-Seigneur Jésus-Christ fut crucifié. Il y eut bien dans l'intervalle trois autres grands-prêtres, mais l'Évangéliste ne fait mention que de ceux qui ont pris une part plus active à la passion du Sauveur. Les préceptes de la loi étaient obligés de céder devant la violence et l'ambition; ce n'était ni le mérite personnel, ni la dignité de la famille qui obtenait le souverain pontificat, la puissance romaine en disposait à son gré. En effet, l'historien Josèphe nous rapporte qu'un des premiers actes de Valérius Gratus, avait été de dépouiller le pontife Anne de la souveraine sacrificature, pour en revêtir Ismaël, fils de Baphi. Quelque temps après, Ismaël en était dépouillé à son tour, et avait pour successeur Eléazar, fils du grand-prêtre Ananias. L'année suivante, Valérius ôtait à Ismaël les insignes sacrés du pontificat pour les remettre à un certain Simon, fils de Caïphe. Un an après, Simon avait pour successeur Joseph, qui s'appelait aussi Caïphe. Tout le temps de la prédication de Notre-Seigneur se trouve ainsi compris dans un espace de quatre ans.
Pilate fut envoyé comme gouverneur en Judée la douzième année du règne de Tibère César, et il conserva ce gouvernement pendant dix années consécutives, presque jusqu'à la fin de la vie de Tibère. Hérode, Philippe et Lysanias sont les fils du roi Hérode, sous le règne duquel naquit le Sauveur. Il faut ajouter à ces trois frères, Hérode Archélaüs, qui régna dix ans, et qui ayant été accusé auprès d'Auguste par les Juifs, fut exilé à Vienne où il mourut. L'empereur Auguste, pour affaiblir re royaume de Judée, le partagea alors en plusieurs tétrarchies.
L'époque où le Précurseur du divin Rédempteur reçut la mission de prêcher et d'annoncer la parole de Dieu, est solennellement désignée par le nom de l'empereur romain et des princes qui régnaient sur la Judée: «L'an quinzième de l'empire de Tibère César, Ponce-Pilate étant gouverneur de la Judée, Hérode, tétrarque de la Galilée», etc. Jean-Baptiste venait annoncer celui qui venait racheter une partie des Juifs et un grand nombre d'entre les Gentils, et c'est pour cela que sa prédication se trouve datée du règne de l'empereur des Gentils et des rois de Judée; et comme la gentilité devait être réunie en un seul corps, il n'est parlé que d'un seul prince qui gouvernait l'empire r omain: «L'an quinzième de l'empire de Tibère César», etc.
Après la mort de l'empereur Auguste, de qui les empereurs romains prirent le nom d'Auguste, Tibère lui succéda, et il était alors dans la quinzième année de son règne.
La Judée se trouvait alors divisée en plusieurs petites principautés, comme un signe de la division et de la ruine dont Dieu devait punir la coupable perfidie des Juifs; selon ces paroles du Sauveur: «Tout royaume divisé contre lui-même sera désolé» ( Lc 11).
Jean-Baptiste venait annoncer celui qui était roi et prêtre à la fois, L'évangéliste saint Luc précise donc l'époque de sa prédication, non seulement par ceux qui régnaient alors sur la Judée, mais par les grands-prêtres actuels des Juifs: «Sous les grands-prêtres Anne et Caïphe».
La parole de Dieu, c'est ici le commandement de Dieu, parce qu'en effet, le fils de Zacharie n'est point venu de son chef, mais par l'impulsion de Dieu lui-même.
L'Église elle-même est comme un désert, parce que celle qui était abandonnée a plus d'enfants que celle qui avait un mari ( Is 54, 1 ; voyez aussi Gal 4, 27). Le Verbe de Dieu s'est donc fait entendre, pour que la terre qui était auparavant déserte, nous produisît des fruits de salut.
Le Fils de Dieu qui devait former et rassembler son Église, commence à opérer par sa grâce dans son serviteur: «La parole du Seigneur se fit entendre à Jean», etc. Ainsi ce n'est pas un homme, mais le Verbe de Dieu qui préside à la première formation de l'Église. Saint Luc proclame Jean prophète par cette formule abrégée: «La parole de Dieu se fit entendre à Jean». En effet, celui qui est rempli de la parole de Dieu a-t-il besoin d'une autre recommandation, et l'Évangéliste n'a-t-il pas tout dit dans ces seules paroles? Saint Matthieu et saint Luc ont voulu au contraire rehausser en Jean-Baptiste le titre de prophète par la description de son vêtement, de sa ceinture et de sa nourriture.
Celui qui était venu dans l'esprit et la vertu d'Elie, devait aussi se séparer du commerce des hommes, et s'appliquer à la contemplation des choses invisibles, de peur qu'habitué aux illusions que produisent les sens, il ne vînt à perdre ces clartés intérieures et celles qui devaient lui faire discerner et reconnaître le Sauveur. Aussi il fut rempli d'une telle abondance des grâces divines, qu'aucun prophète n'en reçut jamais de semblables, parce que durant tout le cours de sa vie, il ne cessa d'offrir aux regards de Dieu une âme pure de tout désir vicieux et de toute passion naturelle.
Les oracles prophétiques qui ne s'adressaient qu'aux Juifs ne font mention que du règne des princes de la nation juive: «Vision d'Isaïe, au temps d'Ozias, de Joathan, d'Achaz et d'Ezéchias, rois de Juda ( Is 1). Mais la prédication de l'Évangile qui devait retentir dans tout l'univers est datée de l'empire de Tibère César, qui paraissait être le maître du monde. Si les Gentils seuls avaient dû avoir part à la grâce du salut, il aurait suffi de parler de Tibère; mais comme les Juifs devaient aussi embrasser la foi, il est également fait mention des principautés et des tétrarchies de la Judée: «Ponce Pilate étant gouverneur de la Judée, Hérode, tétrarque de la Galilée», etc.