Luc 2, 34
Syméon les bénit, puis il dit à Marie sa mère : « Voici que cet enfant provoquera la chute et le relèvement de beaucoup en Israël. Il sera un signe de contradiction
Syméon les bénit, puis il dit à Marie sa mère : « Voici que cet enfant provoquera la chute et le relèvement de beaucoup en Israël. Il sera un signe de contradiction
Bien des actes et des paroles de Jésus ont donc été un " signe de contradiction " (Lc 2, 34) pour les autorités religieuses de Jérusalem, celles que l’Évangile de S. Jean appelle souvent " les Juifs " (cf. Jn 1, 19 ; 2, 18 ; 5, 10 ; 7, 13 ; 9, 22 ; 18, 12 ; 19, 38 ; 20, 19), plus encore que pour le commun du Peuple de Dieu (cf. Jn 7, 48-49). Certes, ses rapports avec les Pharisiens ne furent pas uniquement polémiques. Ce sont des Pharisiens qui le préviennent du danger qu’il court (cf. Lc 13, 31). Jésus loue certains d’entre eux comme le scribe de Mc 12, 34 et il mange à plusieurs reprises chez des Pharisiens (cf. Lc 7, 36 ; 14, 1). Jésus confirme des doctrines partagées par cette élite religieuse du Peuple de Dieu : la résurrection des morts (cf. Mt 22, 23-34 ; Lc 20, 39), les formes de piété (aumône, jeûne et prière, cf. Mt 6, 18) et l’habitude de s’adresser à Dieu comme Père, le caractère central du commandement de l’amour de Dieu et du prochain (cf. Mc 12, 28-34).
Si la Loi et le Temple de Jérusalem ont pu être occasion de " contradiction " (cf. Lc 2, 34) de la part de Jésus pour les autorités religieuses d’Israël, c’est son rôle dans la rédemption des péchés, œuvre divine par excellence, qui a été pour elles la véritable pierre d’achoppement (cf. Lc 20, 17-18 ; Ps 118, 22).
Bien sûr, cette conversion est à comprendre comme une conversion initiale ; elle est suffisante cependant pour que l’homme se rende compte que, détourné du péché, il est introduit dans le mystère de l’amour de Dieu, qui l’appelle à nouer des rapports personnels avec lui dans le Christ. En effet, sous l’action de la grâce de Dieu, le nouveau converti entreprend un itinéraire spirituel par lequel, communiant déjà par la foi au mystère de la mort et de la résurrection, il passe du vieil homme au nouvel homme qui a sa perfection dans le Christ (cf. Col 3, 5-10 ; Ep 4, 20-24). Ce passage, qui entraîne avec lui un changement progressif de la mentalité et des mœurs, doit devenir manifeste avec ses conséquences sociales et se développer peu à peu pendant le temps du catéchuménat. Comme le Seigneur en qui il croit est un signe de contradiction (cf. Lc 2, 34 ; Mt 10, 34-39), il n’est pas rare que le converti fasse l’expérience de ruptures et de séparations, mais aussi connaisse les joies que Dieu donne sans les mesurer (cf. 1 Th 1, 6).
Dieu n’a pas envoyé son Fils pour la perte d’aucun homme ; mais plusieurs, par leur propre perversité, et par leur refus obstiné de ne pas le recevoir, devaient y trouver l’occasion de se perdre.
Après avoir achevé son chant d'allégresse et d'amour, Siméon « bénit » Marie et Joseph.
Assurément il ne s'agit pas d'une bénédiction proprement dite : « bénit » signifie en cet endroit « il les
félicita, il les proclama bienheureux ». Comp. Bretschneider, Lex. Man, et Gesenius, Thésaurus. Mais voici
qu'il reçoit tout à coup d'en haut de nouvelles révélations.. La lumière qu'il avait si admirablement chantée, il
la voit assombrie par de prochains nuages. Alors, se tournant vers Marie sa mère (la mère, dont l'affection est
plus vive et plus tendre ; la mère, par opposition à Joseph, qui n'était que le gardien), il lui dit avec l'accent
de la douleur : Voici que cet enfant est établi …. Ces paroles contiennent une prédiction très importante
relativement à l'Enfant-Dieu. Jésus n'était pas destiné dans le sens strict de cette expression à la ruine de
personne au monde : au contraire, il est venu pour sauver et racheter tous les hommes. Il sera néanmoins une
cause indirecte et involontaire de ruine pour un grand nombre. On comprend sans peine de quelle ruine
Siméon veut parler : c'est d'une ruine spirituelle, d'une chute morale, soit en ce monde soit dans l'autre, pour
tous ceux qui résisteront à Jésus. La résurrection mentionnée ensuite est de même nature : c'est, dès cette vie,
l'élévation, la régénération des âmes qu'avait abaissées le péché, la gloire céleste après la mort. - Cause
involontaire de ruine pour les uns, cause directe de résurrection pour les autres, le Sauveur sera par là-même
un signe de contradiction. Isaïe avait prédit avec non moins de clarté que Siméon ce caractère du Messie :
« Et il sera un sanctuaire, mais aussi une pierre d'achoppement, un rocher de scandale pour les deux maisons
d'Israël, un filet et un piège pour les habitants de Jérusalem. Plusieurs trébucheront; ils tomberont et se
briseront, ils seront enlacés et pris. ». Isaïe. 8, 14 et 15. « Ouvrons l'Évangile, et surtout celui de S. Jean, où
le mystère de Jésus-Christ est découvert plus à fond : c'est le plus parfait commentaire de la parole de
Siméon. Écoutons murmurer le peuple : Les uns disaient, C'est un homme de bien ; les autres disaient, Non,
il trompe le peuple… Les uns disaient, C'est le Christ ; les autres disaient, Le Christ doit-il venir de
Galilée… ? Il y eut donc sur ce sujet une grande discussion… C'est un possédé, disaient les uns, c'est un fou ;
pourquoi l'écouter davantage ? D'autres disaient, Ce ne sont pas là les paroles d'un possédé ? » Bossuet, 12è
Élévat. de la 18è sem. (voir les Élévat. 13-18). Du reste, quelques jours seulement après sa naissance Jésus
était déjà en butte à la contradiction : il était une occasion de ruine pour Hérode, une cause de résurrection
pour les bergers, pour les Mages et les âmes fidèles. La lutte s'est continuée dans le cours des siècles (comp.
Hebr. 12, 3) ; de nos jours elle est plus ardente que jamais, et elle durera jusqu'à la fin du monde. Toujours
l'humanité sera divisée en deux camps au sujet de Jésus et de son Église : le camp des amis et celui des
ennemis.