Jean 9, 7
et lui dit : « Va te laver à la piscine de Siloé » – ce nom se traduit : Envoyé. L’aveugle y alla donc, et il se lava ; quand il revint, il voyait.
et lui dit : « Va te laver à la piscine de Siloé » – ce nom se traduit : Envoyé. L’aveugle y alla donc, et il se lava ; quand il revint, il voyait.
Va à la piscine de Siloé. La fontaine de Siloé est située au pied du mont Ophel, regardant l’est et le village de Siloam qui fait face à Jérusalem, sur le versant septentrional de la vallée de Ben-Hinnom. On descend par un escalier de dix-sept marches sur un palier voûté en ogive et long de 3 m. 50 sur autant de largeur et de hauteur et ayant pour fond le rocher. Un autre escalier de quinze marches taillées dans le roc conduit à la fontaine même. Elle est irrégulièrement intermittente et l’eau en est légèrement saumâtre. Le réservoir est rectangulaire ; il a seize mètres de long environ, sur six mètres de large et six mètres de profondeur. L’eau arrive par un canal creusé dans le roc. Une inscription hébraïque découverte en 1880 et datant vraisemblablement du règne d’Ezéchias nous apprend que le tunnel qui a été percé dans la montagne pour amener l’eau à Siloé fut entrepris par les deux extrémités à la fois. Il fait des zigzags et a 535 mètres de longueur. La source qui alimente la piscine de Siloé en passant par cet aqueduc souterrain est celle qu’on appelle aujourd’hui la Fontaine de la Vierge, la seule source naturelle qui soit proche de Jérusalem, cette ville n’ayant en outre que les citernes recueillant l’eau de pluie et les eaux conduites autrefois à grands frais des vasques de Salomon au sud de Bethléem. La Fontaine de la Vierge est située au fond d’une excavation taillée dans le roc, sur le versant oriental du mont Ophel. On y descend par un escalier de trente marches. La grotte est à environ huit mètres de profondeur. Le bassin a trois mètres et demi de long et un mètre soixante centimètres de large. La source est intermittente ; pendant l’hiver, à la saison des pluies, l’eau coule de trois à cinq fois par jour, à intervalles irréguliers ; pendant l’été elle ne coule que deux fois, et une fois seulement pendant l’automne. On suppose que l’eau provient d’un réservoir naturel caché sous le mont Moriah, au-dessous du temple.
Et il lui dit. C'est la parole à la suite des actes, et encore
a-t-elle pour but de prescrire un nouvel acte, mais qui émanera cette fois de l'infirme lui-même, et non de
Jésus. - Va, lave-toi. Cela aussi est un symbole, comme l'évangéliste va le dire, et nullement un remède
direct. Cf. 4 Reg. 5, 10. La tradition populaire et légendaire qui attribue aujourd'hui même, à Jérusalem, une
influence heureuse aux eaux de Siloé pour les maladies des yeux, est probablement née de ce miracle. - Dans
la piscine de Siloé (εἰς τὴν xολυμδήθραν, à la piscine, au réservoir). La piscine de Siloé est une des rares
localités de Jérusalem sur la situation desquelles il existe un accord parfait entre les topographes. La tradition
est d'ailleurs claire et certaine à son sujet (voyez-en un excellent résumé dans Smith, Dictionary of the Bible,
t. III, s.v. Siloam) : avec les détails donnés par l'historien Josèphe, par l'itinéraire du Pélerin de Bordeaux, par
S.Jérôme et par la longue chaîne des auteurs plus récents, il faudrait que l'erreur fût volontaire pour être
possible. Le réservoir est situé à peu près en face du village qui porte le même nom, à l'angle S.E. de la ville
sainte, « au pied du mont Moriah », suivant l'expression de S.Jérôme, et à l'entrée de la vallée de Tyropéon.
Voyez C. Zimmermann und Socin, Plan des heutigen Jerusalem mit Umgebung, Leipzig, 1881 ; R. Riess,
Atlas de la Bible, pl. 6, etc. Recouverte d'assez bonne heure d'une basilique par les chrétiens, qui avaient ce
lieu en grande dévotion (voyez M. de Vogüé, Les Églises de la Terre Sainte, p.332), elle est depuis longtemps
à ciel ouvert ; toutefois, on y voit encore plusieurs tronçons d'antiques citernes. Ses dimensions sont environ
15 mètres pour la longueur, 5m. de large, et autant pour la profondeur. Elle n'est jamais remplie ; elle ne
contient même d'ordinaire que quelques pieds d'eau. Cette eau venait autrefois de plusieurs directions,
comme le montrent des conduits souterrains récemment découverts ; mais aujourd'hui le réservoir n'est plus
alimenté que par la fontaine dite de la Ste Vierge (comp. le commentaire de 5, 2), située plus au Nord. Son
aspect n'est au reste rien moins que romantique, tant elle s'est détériorée dans la suite des siècles ; mais ce
n'en est pas moins une relique vénérable, chère aux Juifs (à cause des passages Is. 8, 6, et Neh. 3, 15), aux
musulmans et aux chrétiens. Voyez les guides de Palestine, t.III, p.150 et ss.; Caspari, Chronolog.-geograph.
Einleitung in das Leben J.Ch., p.147 ; Tobler, Die Siloahquelle und der Oelberg, St. Gall, 1852, p. 2-58 ;
Wilson, Ordnance Survey of Jerusalem, 1865 ; etc. Son nom apparaît dans le texte grec sous la forme
euphonique de Siloam (Σιλωάμ ; cf. Luc. 12, 4), également employée par les Septante, Flavius Josèphe (qui a
pourtant aussi Σιλώα et Σιλόϰ), et les anciens écrivains de l’Église grecque. - Le narrateur interprète ce nom,
d'origine hébraïque, à l'intention de ses lecteurs non-juifs : qui signifie Envoyé. Mais il se proposait surtout
d'indiquer par là-même le motif spécial pour lequel Jésus voulut que la guérison de l'aveugle ne fut complète
qu'après un lavage opéré avec les eaux de Siloé. Cf. S. August., In Evang. Joan. tract. 44, et S. Jean
Chrysost., Hom. 57 in Joan. En effet, les meilleurs hébraïsants le reconnaissent (Cf. Ewald, Hebr.
Grammatik, §§ 155 et 156 ; Keil, Comment., h.l.), le mot שלוה (Schiloah ; voyez Isaïe, 8, 6) peut très
légitimement se traduire par le passif, comme s'il équivalait au participe שלוה (Schaloah); il n'a pas
nécessairement ici la signification active que lui donnent Roediger et d'autres auteurs (lancer de l’eau. Cf
Gesenius, Thesaurus ling. hebr., s. v.). Or, Jésus étant l'envoyé de Dieu par excellence, le « grand apôtre » de
notre religion (Hebr. 3, 11), il existait entre lui et la fontaine de Siloé un rapport prophétique et mystique, que
S. Jean signale parce qu'il avait occasionné cette circonstance particulière du prodige. Au lieu de ce sens
supérieur, relevé, qui est communément admis, Euthymius et Nonnus dans les temps anciens, de nos jours
Bisping, A. Marie, etc., en proposent un autre qui est presque trivial. « Envoyé », d'après eux, représenterait
l'aveugle envoyé par Jésus à Siloé ! Il n'est pas sans intérêt d'ajouter que la piscine de Siloam jouait alors un
rôle important dans le culte juif, durant l'octave de la fête des Tabernacles : chaque matin, on allait en
procession solennelle y puiser de l'eau pour le service du Temple. Cf. Mischna Yucca, 4, 5, 9, 10. - Il y alla
donc. L'infirme s'en va plein de foi et de docilité ; comme tant d'autres aveugles, il connaissait suffisamment
les rues pour pouvoir exécuter cet ordre. - Et revint voyant. Où alla-t-il ? Le texte ne le dit pas d'une manière
expresse. Chez lui, ce semble, d'après le v. 8 (« voisins ») ; au reste, Jésus ne lui avait pas dit de revenir, et
s'en était aussitôt allé lui-même (Cf. v. 35). Selon d'autres, il s'agirait de sa place accoutumée, auprès de
laquelle il pouvait espérer rencontrer son libérateur. On devine les sentiments de joie qui l'animaient : tout un
monde nouveau s'était ouvert à lui. Mais les évangélistes ne s'arrêtent pas à ces détails et s'en vont toujours
droit aux faits.
1309. L’Évangéliste traite ici de la guérison de l’aveugle, à laquelle concourent, selon un ordre, cinq actes du Christ. D’abord le fait de cracher : IL CRACHA PAR TERRE; puis la préparation de la boue : ET FIT DE LA BOUE AVEC SA SALIVE; ensuite le fait d’enduire les yeux.
ET IL ÉTALA LA BOUE SUR LES YEUX DE L’AVÉUGLE; puis l’ordre de se laver : VA, dit-il, LAVE-TOI DANS LA PISCINE DE SILOÉ; et enfin le recouvrement de la vue, ET IL REVINT VOYANT CLAIR. Chacune de ces actions a une cause littérale et une cause mystique.
1310. Ces actions ont une cause littérale, selon Chrysostome , de la manière suivante. Le Seigneur illumine par la salive pour montrer qu’il accomplissait cela par une puissance émanant de lui, et pour que l’on n’attribue le miracle à aucune autre réalité — Une puissance sortait de lui et les guérissait tous . En effet, bien que le Seigneur eût pu accomplir tous les miracles par sa seule parole, puisqu’il a dit, et [les réalités] ont été faites , fréquemment, cependant, il fait dans les miracles usage de son corps, pour manifester que, en tant qu’il est instrument vivant de la divinité, il a part à une certaine puissance de salut.
Si le Christ fit de la boue avec sa salive, c’est pour montrer qu’il pouvait former les organes défaillants d’un homme, lui qui avait formé tout entier le premier l. C’est pourquoi, de même que le premier homme fut formé à partir de la boue, de même il fit de la boue pour que, à partir d’elle, les yeux de l’aveugle-né soient formés.
S’il étala la boue sur les yeux de l’aveugle, c’est pour montrer, par ce qui, dans les corps, est le plus important, qu’il est lui-même l’auteur des corps. L’homme, en effet, parmi les créatures corporelles, est la plus excellente; et parmi les membres de l’homme, la tête est le plus éminent et, parmi les organes de la tête, l’œil se trouve être le plus excellent — La lampe de ton corps, c’est ton œil . Donc, en formant l’œil plus excellent que les autres réalités corporelles, le Seigneur montre qu’il est le Créateur de tout l’homme et de toute la nature corporelle. Et il dit à l’aveugle : VA, LAVE-TOI DANS LA PISCINE DE SILOÉ, pour qu’il ne semble pas que la terre, appliquée sur les yeux, ait sur eux une vertu curative. Pour cette raison, aussi longtemps qu’il eut la boue sur les yeux, il ne vit pas, mais seulement après s’être lavé.
S’il l’envoya se laver loin [du lieu où il était] — à la piscine de Siloé —, c’est en premier lieu pour abattre la dureté des Juifs. En effet, il lui fallait traverser la cité; ainsi tous le verraient aller aveugle, avec la boue sur les yeux, et le verraient revenir ayant recouvré la vue. C’est ensuite pour faire valoir l’obéissance et la foi de l’aveugle . Peut-être, en effet, avait-il souvent reçu de la boue sur le visage, et s’était-il souvent lavé à la piscine de Siloé, et cependant, il n’avait pas vu. De là vient qu’il aurait pu dire : "La boue a plutôt coutume d’aveugler, et bien des fois je me suis lavé au même endroit, et je n’en ai été aidé en rien", comme on le lit au sujet de Naaman dans le livre des Rois . Mais il n’a pas contredit; bien au contraire il a obéi purement et simplement. C’est pourquoi il est dit : IL ALLA ET SE LAVA. Et la raison pour laquelle le Christ l’envoie à la piscine DE SILOÉ est que le peuple des Juifs est désigné par cette eau : Ce peuple [les Assyriens] a rejeté les eaux de Siloé qui coulent en silence . Donc, pour montrer qu’il n’est pas étranger à l’amour du peuple juif, il l’envoie à Siloé.
L’effet s’ensuit : IL REVINT VOYANT CLAIR. Cela avait été annoncé en Isaïe : Il ouvrira les yeux des aveugles .
1311. La cause mystique et allégorique est donnée par Augustin par le crachat, qui est la salive descendant de la tête, est désigné le Verbe de Dieu, qui procède du Père, tête de toutes les réalités — Moi, je suis sorti de la bouche du Très-Haut . Le Seigneur a donc fait de la boue à partir du crachat et de la terre quand le Verbe s’est fait chair. IL ÉTALA LA BOUE SUR LES YEUX DE L’AVEUGLE, c’est-à-dire du genre humain, les yeux étant ceux du cœur par la foi à l’Incarnation du Christ. Mais il ne voyait pas encore; parce que peut-être , quand le Christ l’a oint, il a fait le catéchumène, qui a la foi mais n’est pas encore baptisé. Et c’est pourquoi il l’envoie à la piscine appelée Siloé pour qu’il soit lavé et illuminé, c’est-à-dire qu’il soit baptisé et qu’il reçoive dans le baptême la pleine illumination . De là vient, selon Denys, que le baptême est appelé illumination — Je répandrai sur vous une eau pure et vous serez purifiés de toutes vos souillures . Et c’est pourquoi il est significatif que cet évangile soit lu, dans l’Eglise romaine, le jour du carême où commence le scrutin de ceux qui seront baptisés le Samedi saint. Ce n’est pas non plus sans raison que l’Evangéliste ajoute l’interprétation du nom de la piscine en disant : CE QUI SIGNIFIE "ENVOYÉ". Car quiconque est baptisé doit être baptisé dans le Christ qui est envoyé par le Père — Vous tous qui avez été baptisés, vous avez revêtu le Christ . Si, en effet, il n’avait pas été envoyé, aucun d’entre nous ne serait libre de son iniquité.
Selon Grégoire , la salive signifie ici la saveur de la contemplation la plus intérieure, qui découle de la tête vers la bouche; car, alors que nous sommes encore établis en cette vie, elle touche, par le goût de la Révélation, à la charité du Créateur. C’est pourquoi le Seigneur a mêlé sa salive à la boue et il a restauré les yeux de l’aveugle-né, parce que la grâce d’en haut irradie notre réflexion charnelle en y mêlant sa contemplation ; et, de leur cécité originelle, il rétablit les hommes dans l’intelligence.
ET IL ÉTALA LA BOUE SUR LES YEUX DE L’AVÉUGLE; puis l’ordre de se laver : VA, dit-il, LAVE-TOI DANS LA PISCINE DE SILOÉ; et enfin le recouvrement de la vue, ET IL REVINT VOYANT CLAIR. Chacune de ces actions a une cause littérale et une cause mystique.
1310. Ces actions ont une cause littérale, selon Chrysostome , de la manière suivante. Le Seigneur illumine par la salive pour montrer qu’il accomplissait cela par une puissance émanant de lui, et pour que l’on n’attribue le miracle à aucune autre réalité — Une puissance sortait de lui et les guérissait tous . En effet, bien que le Seigneur eût pu accomplir tous les miracles par sa seule parole, puisqu’il a dit, et [les réalités] ont été faites , fréquemment, cependant, il fait dans les miracles usage de son corps, pour manifester que, en tant qu’il est instrument vivant de la divinité, il a part à une certaine puissance de salut.
Si le Christ fit de la boue avec sa salive, c’est pour montrer qu’il pouvait former les organes défaillants d’un homme, lui qui avait formé tout entier le premier l. C’est pourquoi, de même que le premier homme fut formé à partir de la boue, de même il fit de la boue pour que, à partir d’elle, les yeux de l’aveugle-né soient formés.
S’il étala la boue sur les yeux de l’aveugle, c’est pour montrer, par ce qui, dans les corps, est le plus important, qu’il est lui-même l’auteur des corps. L’homme, en effet, parmi les créatures corporelles, est la plus excellente; et parmi les membres de l’homme, la tête est le plus éminent et, parmi les organes de la tête, l’œil se trouve être le plus excellent — La lampe de ton corps, c’est ton œil . Donc, en formant l’œil plus excellent que les autres réalités corporelles, le Seigneur montre qu’il est le Créateur de tout l’homme et de toute la nature corporelle. Et il dit à l’aveugle : VA, LAVE-TOI DANS LA PISCINE DE SILOÉ, pour qu’il ne semble pas que la terre, appliquée sur les yeux, ait sur eux une vertu curative. Pour cette raison, aussi longtemps qu’il eut la boue sur les yeux, il ne vit pas, mais seulement après s’être lavé.
S’il l’envoya se laver loin [du lieu où il était] — à la piscine de Siloé —, c’est en premier lieu pour abattre la dureté des Juifs. En effet, il lui fallait traverser la cité; ainsi tous le verraient aller aveugle, avec la boue sur les yeux, et le verraient revenir ayant recouvré la vue. C’est ensuite pour faire valoir l’obéissance et la foi de l’aveugle . Peut-être, en effet, avait-il souvent reçu de la boue sur le visage, et s’était-il souvent lavé à la piscine de Siloé, et cependant, il n’avait pas vu. De là vient qu’il aurait pu dire : "La boue a plutôt coutume d’aveugler, et bien des fois je me suis lavé au même endroit, et je n’en ai été aidé en rien", comme on le lit au sujet de Naaman dans le livre des Rois . Mais il n’a pas contredit; bien au contraire il a obéi purement et simplement. C’est pourquoi il est dit : IL ALLA ET SE LAVA. Et la raison pour laquelle le Christ l’envoie à la piscine DE SILOÉ est que le peuple des Juifs est désigné par cette eau : Ce peuple [les Assyriens] a rejeté les eaux de Siloé qui coulent en silence . Donc, pour montrer qu’il n’est pas étranger à l’amour du peuple juif, il l’envoie à Siloé.
L’effet s’ensuit : IL REVINT VOYANT CLAIR. Cela avait été annoncé en Isaïe : Il ouvrira les yeux des aveugles .
1311. La cause mystique et allégorique est donnée par Augustin par le crachat, qui est la salive descendant de la tête, est désigné le Verbe de Dieu, qui procède du Père, tête de toutes les réalités — Moi, je suis sorti de la bouche du Très-Haut . Le Seigneur a donc fait de la boue à partir du crachat et de la terre quand le Verbe s’est fait chair. IL ÉTALA LA BOUE SUR LES YEUX DE L’AVEUGLE, c’est-à-dire du genre humain, les yeux étant ceux du cœur par la foi à l’Incarnation du Christ. Mais il ne voyait pas encore; parce que peut-être , quand le Christ l’a oint, il a fait le catéchumène, qui a la foi mais n’est pas encore baptisé. Et c’est pourquoi il l’envoie à la piscine appelée Siloé pour qu’il soit lavé et illuminé, c’est-à-dire qu’il soit baptisé et qu’il reçoive dans le baptême la pleine illumination . De là vient, selon Denys, que le baptême est appelé illumination — Je répandrai sur vous une eau pure et vous serez purifiés de toutes vos souillures . Et c’est pourquoi il est significatif que cet évangile soit lu, dans l’Eglise romaine, le jour du carême où commence le scrutin de ceux qui seront baptisés le Samedi saint. Ce n’est pas non plus sans raison que l’Evangéliste ajoute l’interprétation du nom de la piscine en disant : CE QUI SIGNIFIE "ENVOYÉ". Car quiconque est baptisé doit être baptisé dans le Christ qui est envoyé par le Père — Vous tous qui avez été baptisés, vous avez revêtu le Christ . Si, en effet, il n’avait pas été envoyé, aucun d’entre nous ne serait libre de son iniquité.
Selon Grégoire , la salive signifie ici la saveur de la contemplation la plus intérieure, qui découle de la tête vers la bouche; car, alors que nous sommes encore établis en cette vie, elle touche, par le goût de la Révélation, à la charité du Créateur. C’est pourquoi le Seigneur a mêlé sa salive à la boue et il a restauré les yeux de l’aveugle-né, parce que la grâce d’en haut irradie notre réflexion charnelle en y mêlant sa contemplation ; et, de leur cécité originelle, il rétablit les hommes dans l’intelligence.
Il en est qui pensent que cette boue ne fut pas lavée, mais qu'elle servit à former les yeux de cet aveugle.
Cette question paraît fautive de la part des Apôtres, qui n'admettaient pas cette opinion ridicule des Gentils, que l'âme avait péché dans un autre monde où elle avait vécu auparavant ; mais en y réfléchissant de plus près, cette question n'est pas aussi simple qu'elle le parait.
Dans le sens allégorique, nous voyons ici que le Sauveur, chassé du cœur des Juifs, se dirige aussitôt vers les Gentils. Son passage, le chemin qu'il fait, c'est sa descente du ciel sur la terre. Il vit cet aveugle, lorsqu'il abaissa les regards de sa miséricorde sur le genre humain.
Lorsque le Fils affirme qu'il fait les œuvres de son Père, il prouve ainsi que ses œuvres sont les mêmes que celles de son Père, c'est-à-dire, guérir ce qui est infirme, fortifier ce qui est faible, éclairer tous les hommes.
Il y a des châtiments que Dieu inflige aux pécheurs sans qu'il y ait pour lui de retour possible ; il en est d'autres qui le frappent afin de le rendre meilleur ; il en est d'autres encore qui ont pour fin, non point de punir les fautes passées, mais de prévenir les fautes à venir ; d'autres enfin qui n'ont pour but ni de punir les péchés passés, ni de prévenir ceux que l'on peut commettre dans l'avenir, mais de faire connaître d'une manière plus éclatante et aimer plus ardemment la puissance de celui qui sauve par le salut inespéré qui suit immédiatement le châtiment.
Ou bien encore, la salive figure la saveur de la contemplation intime. Elle descend de la tête dans la bouche, parce qu'elle part des splendeurs de Dieu, qu'elle nous fait goûter par les douceurs de la révélation alors que nous sommes encore dans cette vie. Nôtre-Seigneur mêle sa salive à la terre, et donne ainsi à cet aveugle l'usage de la vue, parce que c'est en mêlant la contemplation de la vérité à nos pensées charnelles, que la grâce céleste répand sa lumière dans notre âme, et délivre notre intelligence de la cécité originelle dont elle a été frappée dans le premier homme.
En disant : « Les œuvres de celui qui m'a envoyé, » il renvoie toute la gloire à celui de qui il vient, car le Père a un Fils qui vient de lui, et il n'a pas lui-même de Père de qui il vienne.
Rabbi veut dire maître, ils lui donnent le nom de maître, parce qu'ils voulaient apprendre de lui ce qu'ils ignoraient ; et ils proposent cette question au Seigneur comme à leur maître.
Est-ce donc qu'il était né sans la faute ORIGinelle ou qu'il n'y avait ajouté par la suite aucune faute volontaire ? Non, sans doute, ses parents aussi bien que lui étaient coupables, mais ce n'est pas à cause du péché qu'ils avaient commis que cet homme était né aveugle. Nôtre-Seigneur en donne la véritable cause, lorsqu'il ajoute : « C'est afin, dit-il, que les œuvres de Dieu soient manifestées en lui. »
Mais si nous prenons soin de travailler pendant cette vie, c'est vraiment le jour, c'est le Christ. Aussi Nôtre-Seigneur ajoute-t-il : « Tant que je suis dans le monde, je suis la lumière du monde. » Il est donc lui-même le jour ; ce jour qui se mesure sur la révolution du soleil compte un petit nombre d'heures, mais le jour de la présence de Jésus-Christ s'étend jusqu'à la consommation des siècles, comme il le déclare lui-même : « Voici que je suis avec vous jusqu'à la consommation des siècles. »
Cet aveugle, en effet, c'est le genre humain tout entier qui a été frappé de cécité par le péché du premier homme, dont nous tirons tous notre origine ; il est donc aveugle de naissance. Le Seigneur laisse tomber à terre un peu de salive, et la mélangeant avec la poussière du chemin, il en fait de la boue, parce que le Verbe s'est fait chair, et il étend cette boue sur les yeux de l'aveugle. Lorsque ses yeux étaient ainsi couverts, il ne voyait pas encore, parce que le Seigneur ne fit de lui qu'un catéchumène, lorsqu'il lui couvrit ainsi les yeux. Il l'envoie à la piscine de Siloë, car c'est en Jésus-Christ qu'il a été baptisé, et c'est alors que le Sauveur lui donna l'usage de la vue. L’Evangéliste nous donne la signification du nom de cette piscine, qui veut direenvoyé, et, en effet, si le Fils de Dieu n'avait été envoyé sur la terre, personne d'entre nous n'eût été délivré de son iniquité.
Nôtre-Seigneur vient de dire, en parlant de lui-même : « Afin que la gloire de Dieu soit manifestée, » il ajoute : « Il faut, pendant qu'il est jour, que je fasse les œuvres de celui qui m'a envoyé, » c'est-à-dire, il faut que je me manifeste moi-même, et que je fasse les œuvres propres à me manifester, les mêmes que celles que fait mon Père.
Comme les Juifs n'avaient pu comprendre la hauteur des enseignements de Jésus-Christ, en sortant du temple, il guérit un aveugle. Il veut en se dérobant à leurs regards apaiser leur fureur, et en même temps amollir leur dureté par le miracle qu'il va faire et confirmer la vérité de ses paroles : « Et comme Jésus passait, Jésus vit un homme qui était aveugle de naissance, » etc. Remarquons qu'en sortant du temple, il a le dessein formel d'opérer une œuvre qui fit connaître sa divinité, car c'est lui qui vit l'aveugle, ce ne fut point l'aveugle qui vint le trouver, et il le considéra avec tant d'intérêt, que ses disciples le remarquèrent et lui firent cette question : « Maître, est-ce cet homme qui a péché ou ses parents ? »
Ils furent amenés en effet à lui faire cette question, parce qu'en guérissant le paralytique, Jésus lui avait dit : « Voilà que vous êtes guéri, ne péchez plus davantage. » (Jean, 5) Et dans la pensée que ses péchés avaient été la cause de sa paralysie, ils demandent si cet aveugle ne s'est pas rendu aussi coupable de péché, ce qu'on ne pouvait ni dire ni supposer, puisqu'il était aveugle de naissance ; ou bien ses parents, ce qui n'était pas plus raisonnable, car le fils ne porte pas le péché du père.
On ne peut conclure de ces paroles que les autres aveugles le sont devenus en punition des péchés de leurs parents, car il n'arrive pas qu'un homme soit puni pour le péché d'un autre. Ces paroles du Sauveur : « Afin que la gloire de Dieu soit manifestée, » doivent s'entendre de sa propre gloire et non de celle du Père, dont la manifestation avait déjà eu lieu. Mais cet homme souffrait-il donc injustement ? Non, et je réponds que la cécité fut pour lui un bienfait, car il lui dut de voir des yeux de l'âme. Il est évident que celui qui avait tiré cet homme du néant pour lui donner l'être, avait aussi le pouvoir de l'affranchir de toute infirmité. On peut dire du reste avec quelques-uns, que la particule ut n'exprime pas ici la cause, mais plutôt la conséquence. Comme dans cette autre phrase : « La loi est survenue, ut abundaret delictum, en sorte que le péché a abondé ; » (Rm 5, 20) de même ici, la conséquence de la guérison de cet aveugle et de toutes les autres maladies qui accablent l'infirmité humaine, a été la manifestation de sa puissance.
Il ajoute : « Pendant qu'il est jour, » c'est-à-dire, il me faut agir tandis qu'il est permis aux hommes de croire en moi, ou bien tant que dure cette vie, et les paroles qui suivent viennent à l'appui de cette explication : « La nuit vient, où personne ne peut agir. » Cette nuit dont il a été dit : « Jetez-le dans les ténèbres extérieures. » (Mt 22) La nuit sera donc le temps où personne ne peut plus travailler et où l'on recevra la récompense de sou travail. Tandis que vous vivez, faites donc ce que vous devez faire, car au delà de cette vie, ni la foi n'est possible, ni les travaux, ni le repentir.
C'est par des œuvres que le Sauveur veut confirmer la vérité de ce qu'il vient de dire, l'Evangéliste ajoute donc : « Après avoir parlé ainsi, il cracha à terre, et ayant fait de la boue avec sa salive, il l'étendit sur les yeux de l'aveugle. Celui qui a tiré du néant et appelé à l'être des créatures beaucoup plus importantes, eût bien pu donner des yeux à cet aveugle, sans une matière préexistante; mais il a voulu nous enseigner qu'il était le Créateur, qui au commencement s'est servi de bouc pour créer l'homme. (hom. 57.) Il ne se sert pas d'eau, mais de salive pour faire cette boue, pour vous empêcher d'attribuer rien à la vertu de la fontaine, et vous apprendre que c'est la vertu de sa bouche qui a fait et ouvert les yeux de cet aveugle, et il lui ordonne ensuite de les laver pour que la guérison ne soit point non plus rapportée à une vertu secrète de la terre : « Et il lui dit : Allez vous laver dans la piscine de Siloë (mot qui veut dire envoyé), » pour vous apprendre que je n'ai pas besoin de boue pour faire des yeux. La piscine de Siloë tirait toute sa vertu de Jésus-Christ qui opérait toutes les guérisons qui s'y faisaient, et c'est pour cela que l'Evangéliste donne la signification de ce nom en ajoutant : « Qui signifie envoyé, » et il vous apprend par là que c'est Jésus-Christ qui a guéri cet aveugle. De même, en effet, que l'Apôtre nous dit : « La pierre c'était le Christ, » ainsi la piscine de Siloë, alimentée par un cours d'eau qui coulait soudainement à certains intervalles, nous figurait secrètement que Jésus-Christ se manifeste souvent contre toute espérance. Mais pourquoi donc ne lui commande-t-il pas de se laver immédiatement sans aller à la piscine de Siloë ? C'est pour mieux confondre l'impudence des Juifs. Il était bon, en effet, que tous le vissent se diriger vers cette piscine, ayant les yeux couverts de boue. Jésus voulait d'ailleurs montrer en l'envoyant à cette piscine, qu'il n'est opposé ni à la loi, ni à l'Ancien Testament. Il n'était point d'ailleurs à craindre qu'on attribuât la gloire de cette guérison à la piscine de Siloë, car beaucoup s'y lavaient les yeux sans obtenir une grâce aussi importante. Il voulait encore faire éclater la foi de cet aveugle, qui ne cherche pas à contredire le Sauveur, qui ne se dit pas en lui-même : La boue d'ordinaire est bien plus propre à faire perdre la vue qu'à la rendre, je me suis lavé plusieurs fois dans la piscine de Siloë, je n'en ai éprouvé aucun soulagement, si cette eau avait quelque efficacité, elle m'eût guéri sur-le-champ, il obéit avec simplicité : « Il y alla, se lava et revint voyant clair. » (hom. 56.) C'est donc ainsi qu'il manifesta sa gloire, car ce n'est pas une faible gloire que de passer pour le créateur de toutes choses ; la foi que l'on donnait à cette grande vérité en faisait accepter d'autres moins importantes. L'homme, en effet est la première et la plus honorable de toutes les créatures ; et de tous ses membres, l'œil est le plus digne d'honneur, car c'est lui qui gouverne le corps, lui qui est le plus bel ornement du visage, ce qu'est le soleil dans l'univers, l'œil l'est dans le corps de l'homme, c'est pour cela qu'il occupe la partie la plus élevée et qu'il y est placé comme sur son trône.