Jean 9, 27

Il leur répondit : « Je vous l’ai déjà dit, et vous n’avez pas écouté. Pourquoi voulez-vous m’entendre encore une fois ? Serait-ce que vous voulez, vous aussi, devenir ses disciples ? »

Il leur répondit : « Je vous l’ai déjà dit, et vous n’avez pas écouté. Pourquoi voulez-vous m’entendre encore une fois ? Serait-ce que vous voulez, vous aussi, devenir ses disciples ? »
Louis-Claude Fillion
Je vous l’ai déjà dit... La patience échappe visiblement au mendiant. Non seulement il est fatigué de toutes ces questions et contre-questions, mais il en comprend la portée, et sa nature droite, loyale, s'indigne du jeu misérable des Pharisiens ; aussi refuse-t-il avec vivacité de leur servir d'instrument. - Et vous avez entendu. Dans le grec, au contraire, ϰαὶ οὐϰ ἡϰούσατε, « et vous n’avez pas entendu » (la négation est certainement authentique). Ils avaient entendu, mais leurs préjugés les faisaient agir comme si le sujet était pour eux tout à fait neuf. Il n'est pas nécessaire de donner, avec divers commentateurs, un tour interrogatif à la pensée (N'avez-vous donc pas entendu ?) ; il serait plus imparfait encore de prendre le verbe « audire » dans le sens de faire attention, car alors il aurait coup sur coup deux significations différentes ! (Vous n'avez pas été attentifs ; pourquoi donc voulez-vous entendre de nouveau mon récit ?). - Est-ce que... (μὴ ϰαί. Cf. 4, 29 ; 7, 67 ; 6, 35, 52, etc. Sans doute vous ne songez pas...!) vous aussi... : même vous ! comme tant d'autres l'ont déjà fait. L'aveugle avait appris par la voix publique que des disciples assez nombreux s'étaient attachés à son bienfaiteur ; mais il comprenait fort bien, par ce qui venait de se passer dans son double interrogatoire, que le Pharisiens détestaient Notre-Seigneur : aussi une telle supposition revêt-elle sur ses lèvres le caractère de la plus mordante ironie.
Saint Thomas d'Aquin
À ce sujet l’Évangéliste expose d’abord la malice des pharisiens puis la constance de l’aveugle .

La malice des pharisiens apparaît dans l’effort qu’ils font pour le persuader de nier la vérité. La constance de l’aveugle apparaît dans sa ferme confession de la vérité.

1336. L’Évangéliste dit donc : ILS, c’est-à-dire les pharisiens, CONVOQUÈRENT DE NOUVEAU L’HOMME QUI AVAIT ÉTÉ AVEUGLE en effet les parents, interrogés, les avaient renvoyés à l’aveugle — ET LUI DIRENT : "RENDS GLOIRE À DIEU!" Ils disent une chose mais tacitement ils ont en vue une autre. Ils cherchent en effet à le forcer à dire qu’il n’a pas été illuminé par le Christ, ou, s’ils ne le peuvent, à lui faire au moins dire qu’il a été guéri par lui au moyen d’un quelconque artifice. Ils ne le disent cependant pas ouvertement, mais tacitement et sous couvert de religion. Voilà à quoi ils veulent amener l’aveugle en lui disant : RENDS GLOIRE À DIEU! comme s’ils disaient : Tu as été illuminé, mais cela ne vient que de Dieu; donc tu ne dois l’attribuer à personne d’autre qu’à Dieu, et non à celui-ci, le Christ; car si tu le fais, tu montreras que tu n’as pas reçu de Dieu le bienfait de la guérison, puisque Dieu n’opère pas de miracles par des pécheurs. C’est pourquoi ils ajoutent : NOUS SAVONS, NOUS, QUE CET HOMME EST UN PÉCHEUR, comme pour dire : Confesse que celui-ci n’a rien accompli, nie ce que tu as reçu. Mais, comme le dit Augustin , s’il avait fait cela, il n’aurait pas rendu gloire à Dieu; bien plutôt, se montrant ingrat, il aurait blasphémé. Mais la langue acérée des pharisiens a vraiment proféré le mensonge quand ils ont dit : NOUS SAVONS, NOUS, QUE CET HOMME EST UN PÉCHEUR; car, plus haut, ils n’ont pas pu le convaincre de péché : Qui d’entre vous me convaincra de péché ? Rien d’étonnant à cela, puisqu’il est dit dans la première épître de Pierre : Il n’a pas commis le péché, on n’a pas trouvé de mensonge en sa bouche .

1337. L’Évangéliste expose ici la constance de l’aveugle. Exaspéré par la dureté des pharisiens et ne souffrant pas leurs paroles, il dit, en affirmant la vérité S’IL EST UN PÉCHEUR, JE NE SAIS.

Mais puisque, plus haut, il disait qu’IL EST UN PROPHÈTE, n’est-ce pas par crainte, et comme en doutant, qu’il dit ici S’IL EST UN PÉCHEUR, JE NE SAIS? Pas du tout; [parlant] comme [un homme] indigné, il se moque des pharisiens. Comme s’il disait : vous le tenez pour un pécheur, mais moi, que ce soit un pécheur, je ne le sais pas, et je m’étonne que vous l’affirmiez, car il a accompli une œuvre qui ne semble pas être celle d’un pécheur, puisque ALORS QUE J’ÉTAIS AVEUGLE, MAINTENANT, JE VOIS, grâce à lui. Selon Augustin , il dit cela pour ne pas subir de calomnie et ne pas non plus cacher la vérité. Peut-être en effet, s’il avait dit : "Je sais qu’il est juste" — ce qui était vrai — l’auraient-ils calomnié. Mais selon Chrysostome il a dit cela pour lui rendre un plus grand témoignage, celui de l’œuvre miraculeuse elle-même, et rendre sa réponse digne de foi à cause du bienfait reçu.

1338. Ici, ils l’interrogent de nouveau pour le calomnier. L’interrogation fourbe des pharisiens est d’abord exposée, puis l’ironie avec laquelle l’aveugle leur répond .

1339. Concernant le premier point, l’Evangéliste dit : ILS LUI DIRENT ALORS : "QUE T’A-T-IL FAIT?" En effet, l’aveugle avait confessé qu’il avait reçu du Christ la vision. Mais ce n’est pas cela que les pharisiens cherchaient à savoir; ils s’efforçaient plutôt à porter une calomnie contre le Christ dans la manière même dont il avait agi. C’est pourquoi ils ne disent pas De quelle manière as-tu vu? mais COMMENT T’A-T-IL OUVERT LES YEUX? — comme s’ils disaient : N’a-t-il pas fait cela grâce à un quelconque artifice ou à quelque magie, selon ce passage du psaume : Ceux qui me voulaient du mal ont proféré des paroles vaines, et tout le jour ils méditaient des fourberies .

1340. L’Évangéliste expose ici la réponse parce qu’il se comporte comme s’il voyait déjà spirituellement, l’aveugle termine non pas avec retenue, mais avec audace. Il tourne d’abord en dérision l’interrogation réitérée des pharisiens, en disant : JE VOUS L’AI DÉJÀ DIT ET VOUS AVEZ ENTENDU : QUE VOULEZ-VOUS ENTENDRE À NOUVEAU? comme pour dire : Puisque je vous l’ai déjà dit une fois, que voulez-vous entendre à nouveau? Cela, c’est le propre de l’insensé ! Il semble en effet que vous n’ayez pas prêté attention à ce que je vous ai dit. C’est pourquoi il n’y a plus lieu de vous répondre davantage, à vous qui interrogez sans raison et qui, plutôt que de vouloir apprendre, cherchez chicane — Il s’adresse à un dormeur, celui qui commente la sagesse à un sot. Et à la fin du discours, celui-ci dit Qui est celui-ci?

Il tourne ensuite en dérision la présomptueuse intention des pharisiens, en disant : VOULEZ-VOUS DEVENIR, VOUS AUSSI, SES DISCIPLES? En effet, lorsqu’on fait avec diligence une enquête [sur quelqu’un], on la fait soit avec une bonne intention, afin d’adhérer à lui, soit avec une intention mauvaise, afin de le condamner. Donc, puisqu’ils s’enquéraient avec une certaine diligence et que l’aveugle n’a pas osé leur reprocher de s’enquérir avec une mauvaise intention, il se tourne vers l’autre possibilité : VOULEZ-VOUS DEVENIR, VOUS AUSSI, SES DISCIPLES? comme pour dire : Si vous ne cherchez pas avec malice, c’est donc que vous voulez vous attacher à lui — Si l’éthiopien peut changer sa peau, ou le léopard ses taches, alors vous aussi pourrez bien faire . Et comme le dit Augustin, ayant lui-même été illuminé, il voulait de bon cœur qu’eux aussi soient illuminés. C’est pourquoi il dit expressément : VOUS AUSSI, comme suggérant qu’il est lui-même disciple, VOULEZ-VOUS DEVENIR, comme je le suis moi-même, SES DISCIPLES? Pour moi, je vois déjà et je ne conçois pas d’envie de votre propre illumination . Et comme le dit Chrysostome , cette constance de l’aveugle fait apparaître combien fort est ce qu’est la vérité, laquelle, si elle prend ceux que l’on considère comme rien, en fait des hommes éclairés et forts; et combien faible est ce qu’est le mensonge, lui qui, même chez les puissants, manifeste leur faiblesse et les rend faibles.