Jean 8, 6

Ils parlaient ainsi pour le mettre à l’épreuve, afin de pouvoir l’accuser. Mais Jésus s’était baissé et, du doigt, il écrivait sur la terre.

Ils parlaient ainsi pour le mettre à l’épreuve, afin de pouvoir l’accuser. Mais Jésus s’était baissé et, du doigt, il écrivait sur la terre.
Louis-Claude Fillion
Ils disaient cela… Encore une de ces notes précieuses dont S. Jean entrecoupe son récit pour interpréter certaines situations. - Pour le tenter : En quoi consistait précisément la « tentation », ou l’embûche tendue à N.-S. Jésus-Christ ? D’après la plupart des anciens exégètes, les pharisiens et les Scribes supposaient avec assez de fondement que l’ « ami des publicains et des pécheurs » se montrerait moins sévère que Moïse, et alors ils l’accuseraient auprès du Sanhédrin comme un violateur de la loi (afin de pouvoir l’accuser). Les commentateurs modernes et contemporains pensent que le jeu des interrogateurs était plus habile encore, et qu’en toute hypothèse Jésus devait tomber dans un piège : s’il renvoyait la coupable absoute, on le faisait condamner lui-même par le grand Conseil ainsi qu’il vient d’être dit ; s’il la déclarait digne de mort, on le livrait à l’autorité romaine, qui avait retiré aux Juifs le droit d’exécuter les sentences capitales. Mais cette dernière conjecture nous paraît un peu compliquée et hors de la situation ; nous nous en tenons donc à l’opinion ancienne. - Mais Jésus… Pas plus qu’en vingt autres occasions semblables le divin Maître ne se laissera « tenter » par ses ennemis. Il use d’abord contre eux de l’arme la plus puissante en pareil cas, l’arme du silence. - Se baissant, écrivait du doigt. Délicieux tableau, quoique la circonstance soit si triste. On croirait voir chacun des gestes du Sauveur. Assis sur un de ces sièges peu élevés qu’affectionnent les Orientaux, il n’a qu’à s’incliner médiocrement pour atteindre le sol. L’imparfait marque la durée. - Sur la terre : sur la poussière qui recouvrait les dalles du parvis ou de la cour. Par cet acte, Jésus donnait à entendre à ses interrogateurs qu’il ne voulait pas entrer dans le détail de leur question, qu’il ne faisait pas même attention à ce qu’ils lui disaient. C’est en effet, comme maint exemple classique le prouve, le geste d’un homme qui s’absorbe ou feint de s’absorber dans ses pensées, et qui demeure étranger aux choses qui se passent autour de lui. « Sans prononcer une syllabe, en vous bornant à froncer les sourcils, en vous inclinant, ou en fixant les yeux sur le sol, vous pouvez déjouer des importunités fâcheuses », dit Plutarque, 2, 532. Cf. Aristophane, Acharn. 31. Voyez aussi des exemples empruntés aux Rabbins dans Wetstein et Lightfoot, Horae hebr. et talm., h. l. Aussi est-ce bien à tort que l’on s’est parfois demandé : Qu’écrivait donc Jésus-Christ sur le sol ? Naturellement, les réponses sont extrêmement variées. Il écrivait les péchés de ceux qui l’interrogeaient, disait déjà S. Jérôme ; ou bien, les paroles qu’il prononça un peu plus tard, verset 7 ; ou encore, les mots « comme c’est écrit » ; etc. Il est vraisemblable qu’il n’écrivait rien de déterminé ; du moins, ce qui importe ici, c’est l’action même et point les choses écrites.