Jean 8, 44
Vous, vous êtes du diable, c’est lui votre père, et vous cherchez à réaliser les convoitises de votre père. Depuis le commencement, il a été un meurtrier. Il ne s’est pas tenu dans la vérité, parce qu’il n’y a pas en lui de vérité. Quand il dit le mensonge, il le tire de lui-même, parce qu’il est menteur et père du mensonge.
Vous, vous êtes du diable, c’est lui votre père, et vous cherchez à réaliser les convoitises de votre père. Depuis le commencement, il a été un meurtrier. Il ne s’est pas tenu dans la vérité, parce qu’il n’y a pas en lui de vérité. Quand il dit le mensonge, il le tire de lui-même, parce qu’il est menteur et père du mensonge.
L’Écriture parle d’un péché de ces anges (cf. 2 P 2, 4). Cette " chute " consiste dans le choix libre de ces esprits créés, qui ont radicalement et irrévocablement refusé Dieu et son Règne. Nous trouvons un reflet de cette rébellion dans les paroles du tentateur à nos premiers parents : " Vous deviendrez comme Dieu " (Gn 3, 5). Le diable est " pécheur dès l’origine " (1 Jn 3, 8), " père du mensonge " (Jn 8, 44).
L’Écriture atteste l’influence néfaste de celui que Jésus appelle " l’homicide dès l’origine " (Jn 8, 44), et qui a même tenté de détourner Jésus de la mission reçue du Père (cf. Mt 4, 1-11). " C’est pour détruire les œuvres du diable que le Fils de Dieu est apparu " (1 Jn 3, 8). La plus grave en conséquences de ces œuvres a été la séduction mensongère qui a induit l’homme à désobéir à Dieu.
" Le mensonge consiste à dire le faux avec l’intention de tromper " (S. Augustin, mend. 4, 5 : PL 40, 491). Le Seigneur dénonce dans le mensonge une œuvre diabolique : " Vous avez pour père le diable ... il n’y a pas de vérité en lui : quand il dit ses mensonges, il les tire de son propre fonds, parce qu’il est menteur et père du mensonge " (Jn 8, 44).
" Homicide dès l’origine, menteur et père du mensonge " (Jn 8, 44), " le Satan, le séducteur du monde entier " (Ap 12, 9), c’est par lui que le péché et la mort sont entrés dans le monde et c’est par sa défaite définitive que la création toute entière sera " libérée du péché et de la mort " (MR, prière eucharistique IV). " Nous savons que quiconque est né de Dieu ne pèche pas, mais l’Engendré de Dieu le garde et le Mauvais n’a pas prise sur lui. Nous savons que nous sommes de Dieu et que le monde entier gît au pouvoir du Mauvais " (1 Jn 5, 18-19) :
Derrière le choix désobéissant de nos premiers parents il y a une voix séductrice, opposée à Dieu (cf. Gn 3, 4-5) qui, par envie, les fait tomber dans la mort (cf. Sg 2, 24). L’Écriture et la Tradition de l’Église voient en cet être un ange déchu, appelé Satan ou diable (cf. Jn 8, 44 ; Ap 12, 9). L’Église enseigne qu’il a été d’abord un ange bon, fait par Dieu. " Le diable et les autres démons ont certes été créés par Dieu naturellement bons, mais c’est eux qui se sont rendus mauvais " (Cc. Latran IV en 1215 : DS 800).
A la source de toute violence contre le prochain, il y a le fait de céder à la « logique » du Mauvais, c'est-à-dire de celui qui « était homicide dès le commencement » (Jn 8, 44), comme nous le rappelle l'Apôtre Jean: « Car tel est le message que vous avez entendu dès le début: nous devons nous aimer les uns les autres, loin d'imiter Caïn, qui, étant du Mauvais, égorgea son frère » (1 Jn 3, 11-12). Ainsi, le meurtre du frère à l'aube de l'histoire donne un triste témoignage de la manière dont le mal progresse avec une rapidité impressionnante: à la révolte de l'homme contre Dieu au paradis terrestre s'ajoute la lutte mortelle de l'homme contre l'homme.
Dieu se proclame Seigneur absolu de la vie de l'homme, formé à son image et à sa ressemblance (cf. Gn 1, 26-28). Par conséquent, la vie humaine présente un caractère sacré et inviolable, dans lequel se reflète l'inviolabilité même du Créateur. C'est pourquoi, Dieu se fera le juge exigeant de toute violation du commandement « tu ne tueras pas », placé à la base de toute la convivialité de la société. Il est le « goël », c'est-à-dire le défenseur de l'innocent (cf. Gn 4, 9-15; Is 41, 14; Jr 50, 34; Ps 19 18, 15). De cette manière, Dieu montre aussi qu'« il ne prend pas plaisir à la perte des vivants » (Sg 1, 13). Seul Satan peut s'en réjouir: par son envie, la mort est entrée dans le monde (cf. Sg 2, 24). Lui, qui est « homicide dès le commencement », est aussi « menteur et père du mensonge » (Jn 8, 44): trompant l'homme, il le conduit jusqu'au péché et à la mort, présentés comme des fins et des fruits de vie.
Cette obéissance n'est pas toujours facile. A la suite du mystérieux péché originel, commis à l'instigation de Satan, « menteur et père du mensonge » (Jn 8, 44), l'homme est tenté en permanence de détourner son regard du Dieu vivant et vrai pour le porter vers les idoles (cf. Th 1, 9), échangeant « la vérité de Dieu contre le mensonge » (Rm 1, 25) ; même la capacité de connaître la vérité se trouve alors obscurcie et sa volonté de s'y soumettre, affaiblie. Et ainsi, en s'abandonnant au relativisme et au scepticisme (cf. Jn 18, 38), l'homme recherche une liberté illusoire en dehors de la vérité elle-même.
Jésus-Christ finit par dire ouvertement aux Juifs ce qu’il leur avait laissé
entrevoir d’une manière implicite aux versets 38 et 41 : ils ne sont ni enfants d’Abraham, ni enfants de Dieu,
mais fils du démon. - Vous (très accentué) avez le diable pour père. Le langage n’est pas moins expressif que
la pensée. On ne pouvait adresser à des descendants d’Abraham, à des membres de la nation théocratique, un
blâme plus sévère. Cf. 1 Joan. 3, 8, 10. Le gnostique Héracléon, voulant trouver ici un appui pour son
système, rattacha autrement le second génitif au premier, de manière à pouvoir traduire : Vous descendez du
père du diable ; d’où il concluait que les Juifs et le démon n’avaient pas été créés par Dieu, mais par le
mauvais principe. Nous n’aurions rien dit de cette aberration étrange, si un rationaliste contemporain,
Hilgenfels, ne l’eût récemment rééditée. Cf. Die Evangelien nach ihrer Entstehung und geschicht. Bedeutung, 1854, p. 289. - Et par suite. Jésus rattache naturellement leur conduite à leur origine : celle-ci est
la meilleure explication de celle-là. - Vous voulez accomplir les désirs de votre père : les passions violentes ;
spécialement, d’après le contexte, la haine homicide et l’envie. Les Juifs ne se contentent pas d’agir à l’instar
du démon leur père ; ils l’imitent avec un plein consentement : ses exemples funestes ont toute leur
sympathie - Il a été homicide (expression grecque qu’on ne rencontre nulle part ailleurs) dès le
commencement. C’est-à-dire, dès l’apparition de l’homme sur la terre, aussitôt que l’homicide fut possible.
Le démon, en effet, par ses insinuations perfides, a causé la désobéissance d’Adam et d’Eve, d’où est
résultée la mort pour tout le genre humain. Cf. Gen. 3 ; Sap. 2, 23-24 ; Rom. 5, 12 ; Apoc. 12, 9 ; 20, 2. Les
écrits rabbiniques sont pareillement remplis de cette idée : « L’antique serpent, qui a tué Adam », Sohar
Chadasch. Etc. Aussi est-ce à tort qu’on a parfois appliqué ce dire de Jésus au meurtre de Caïn. Cf. 1 Joan. 3,
12. Notez l’imparfait de la continuité : l’homicide a toujours fait partie de la nature morale de Satan. Un
rapprochement se fait de lui-même : il n’est pas étonnant que les fils du démon entretiennent aussi des désirs
meurtriers. Cf. verset 40. - Et il n’est pas demeuré dans la vérité (sans article dans le grec). Autre trait
caractéristique du diable : il ne s’est pas tenu ferme dans la sphère de la vérité. Ces mots contiennent une
allusion évidente à la chute de Satan, comme l’admettent tous les commentateurs catholiques. Cf. Judae, 6.
Du reste, tout ce passage est justement classique en théologie : Notre Seigneur Jésus-Christ n’a rien dit de
plus net ni de plus formel sur le chef des démons. - Parce qu’il n’y a pas de vérité (encore sans article : il n’y
a pas de vérité) en lui. C’est la même pensée, exprimée en termes positifs et plus énergiques. - Lorsqu’il dit
le mensonge... Jésus tire la conséquence des paroles qui précèdent. Un être qui est sorti de la vérité, ment
d’une façon perpétuelle, et, quand il ment, il est tout à fait dans son rôle : il dit ce qu’il trouve en lui-même
(expression grecque très forte) Cf. 1, 11 ; 2 Cor. 3, 5. - Car il est menteur et le père du mensonge. Cette
répétition de la même pensée a quelque chose de saisissant.