Jean 7, 19
Moïse ne vous a-t-il pas donné la Loi ? Et aucun de vous ne met la Loi en pratique. Pourquoi cherchez-vous à me tuer ? »
Moïse ne vous a-t-il pas donné la Loi ? Et aucun de vous ne met la Loi en pratique. Pourquoi cherchez-vous à me tuer ? »
La conduite morale de Jésus, v. 19-24. La transition est assez brusque ; mais rien n'autorise à conjecturer,
comme l'ont fait divers commentateurs, qu'une pensée intermédiaire aurait été omise par l'évangéliste. Après
s'être tenu pendant quelques instants sur la défensive, v. 16-18, Jésus pousse maintenant l'attaque sur le
terrain de ses adversaires. Il va droit au fait, et divulgue le véritable motif de leurs objections : ils en veulent
à sa vie. Partant de là, il donne une courte mais solide apologie de sa conduite, de même qu'il a plus haut
défendu sa doctrine. Moïse… Ce grand nom porte l'idée principale. Moïse, de qui vous vous recommandez
sans cesse, sera le premier à vous condamner. Voyez, v. 45, un raisonnement semblable. - Donné la loi. La loi
par excellence, la loi mosaïque en général, et pas seulement tel ou tel précepte particulier (la loi relative au
sabbat, à l'homicide, etc.), comme on l'a prétendu sans raison. - Et aucun de vous… Parmi vous qui avez reçu
cette loi et qui en êtes si fiers. Cf. Gal. v. 3, la même expression. Accusation bien grave, mais parfaitement
justifiée ; car si les Juifs observaient alors minutieusement la plupart des détails de la loi, ils demeuraient
étrangers à son esprit contre lequel ils allaient sans cesse. Cf. Matth. 5, 17-47 et le commentaire. Et c'étaient
ces mêmes hommes qui voulaient mettre à mort Jésus-Christ, sous prétexte qu'il était un contempteur de la
loi ! - Nous avons adopté le sentiment des interprètes qui mettent un point d'interrogation au milieu du verset
et un simple point à la fin. La pensée nous paraît ainsi tout à la fois plus coulante et plus énergique.
Dans les premiers jours de la fête, l'attention était presque tout entière à la solennité elle-même ; mais dans les jours suivants, les esprits étaient plus disposés à écouter attentivement le Sauveur.
C'est-à-dire, je suis digne de foi, parce que ma doctrine est l'expression de la vérité, il n'y a point en moi d'imposture, parce que je ne cherche pas à usurper la gloire d'autrui.
Jésus se rendit alors à Jérusalem, moins pour la solennité que pour manifester sa divine lumière. Ses parents s'y rendirent pour y jouir des plaisirs de cette fête, mais le vrai jour de fête pour Jésus-Christ, fut celui où il racheta le monde par sa passion.
Voilà celui qui avait voulu d'abord se couvrir des voiles de l'obscurité qui enseigne, et parle en public, et personne ne s'empare de lui, car s'il a voulu rester caché, c'est pour notre instruction, et s'il se manifeste, c'est pour donner des preuves de sa puissance.
Ou bien encore, il dit qu'elle est sa doctrine dans un sens, et qu'elle ne l'est pas dans un autre sens ; si on le considère comme Dieu, c'est sa doctrine ; si on le considère comme homme, elle n'est plus sa doctrine, mais celle de son Père.
Cette fête, comme le récit le donne à entendre, se célébrait durant plusieurs jours; voilà pourquoi l'Evangéliste dit : « Vers le milieu de la fête, » c'est-à-dire, lorsqu'il restait encore autant de jours qu'il s'en était écoulé. Nôtre-Seigneur agit de la sorte pour tenir la parole qu'il a donnée : « Je ne vais point à ce jour de fête que vous m'indiquez, » c'est-à-dire le premier ou le second, mais il se rend à Jérusalem vers le milieu de la fête.
Tous sans doute partageaient cet étonnement, mais tous ne se convertissaient pas. Et d'où venait donc cet étonnement ? C'est qu'un grand nombre d'entre eux connaissaient le lieu de sa naissance et le genre de son éducation. Ils ne l'avaient jamais vu apprendre les lettres, et ils l'entendaient cependant discuter la loi, citer les textes de la loi, ce qu'on ne peut faire sans avoir lu la loi, que personne ne peut lire avant d'avoir fait des études littéraires, et c'est ce qui causait leur étonnement.
Il semble y avoir une contradiction dans ces paroles : « Ma doctrine n'est pas la mienne, mais la doctrine de celui qui m'a envoyé. » S'il avait dit : Cette doctrine n'est pas la mienne, il n'y aurait eu aucune difficulté. Quelle est donc la doctrine du Père, si ce n'est le Verbe du Père ? Jésus-Christ est donc la doctrine du Père, s'il est le Verbe du Père. Mais comme le Verbe ou la parole doivent nécessairement avoir un auteur, Nôtre-Seigneur s'identifie avec sa doctrine, et déclare cependant qu'elle n'est pas de lui, parce qu'il est le Verbe du Père. Qu'y a-t-il de plus à vous que vous-même ? Et qu'y a-t-il de moins à vous que vous-même, si vous tenez d'un antre tout ce que vous avez ? En un mot, voici ce que le Sauveur a voulu dire : « Ma doctrine n'est pas de moi. » Ce qui revient à cette proposition : Je ne viens pas de moi-même. » Ces paroles renversent l'hérésie des Sabelliens, qui ont osé avancer que le Fils était le même que le Père, et qu'il y avait deux noms pour exprimer une seule chose.
Si l'intelligence dé ces paroles laisse encore à désirera quelques-uns, qu'ils écoutent le conseil que leur donne le Sauveur : « Si quelqu'un veut faire la volonté de Dieu, il reconnaîtra si ma doctrine est de Dieu. » Mais, que signifient ces paroles : « Si quelqu'un veut faire la volonté de Dieu ? » C'est-à-dire, s'il veut croire en Jésus-Christ, car il a dit lui-même précédemment : « L'œuvre de Dieu est que vous croyiez en celui qu'il a envoyé ; » or, qui ne sait qu'accomplir la volonté de Dieu, c'est faire son œuvre ? De même encore, connaître c'est comprendre. Ne cherchez donc pas à comprendre pour arriver à la foi, mais commencez par croire pour arriver à l'intelligence, car si vous ne croyez pas, vous ne comprendrez pas. (Is 5, 9, selon la vers. des Sept.)
Celui qui cherche sa propre gloire est un Antéchrist. Nôtre-Seigneur nous a donné un grand exemple d'humilité, lorsque s'étant rendu semblable à nous par ce qui a paru de lui au dehors, il a cherché non point sa gloire, mais celle de son Père ; pour vous, au contraire, faites-vous quelque bonne action, vous n'y cherchez que votre gloire ; faites-vous le mal, vous le rejetez injustement sur Dieu.
Remarquez donc qu'une des causes de ce langage si humble dans la bouche du Sauveur, c'est de bien persuader les Juifs qu'il ne désire ni la gloire, ni la puissance ; c'est aussi de s'accommoder à la faiblesse de ses auditeurs, et enfin d'enseigner aux hommes la fuite de l'orgueil et la pratique de l'humilité dans les pensées comme dans les paroles.
Nôtre-Seigneur, en ne se rendant pas à la fête dans les premiers jours, mais vers le milieu de la fête, comme l'Evangéliste le remarque, voulait par ce retard rendre les Juifs plus attentifs à sa doctrine. En effet, ceux qui l'avaient cherché dans les premiers jours, en le voyant tout à coup sous leurs yeux, quelles que fussent d'ailleurs leurs dispositions, qu'ils le considérassent comme un homme de bien ou comme un séducteur, étaient naturellement portés à donner une plus grande attention à ses enseignements, les uns pour admirer sa doctrine, et en profiter, les autres pour le surprendre et se saisir de sa personne.
Quel était le sujet de son enseignement ? L’Evangéliste n'en dit rien, il rapporte seulement qu'il instruisait d'une manière admirable, car son enseignement-avait un tel caractère d'autorité, que ceux mêmes qui l'accusaient de séduire le peuple étaient complètement changés et dans un profond étonnement : « Et les Juifs étonnés disaient : Comment sait-il les Ecritures, puisqu'il ne les a pas apprises ? » Voyez comme leur étonnement est plein de malice ; l'Evangéliste ne nous dit pas en effet que ce fut sa doctrine qui excitât leur étonnement, c'était une autre cause, le désir de savoir comment il pouvait avoir tant de science.
Cette incertitude et ce doute devaient leur faire conclure que la science du Sauveur n'était pas d'origine humaine, mais qu'elle était divine. Ils ne vont pas au delà de l'étonnement, parce qu'ils ne veulent pas tirer cette conclusion. Nôtre-Seigneur va donc s'en charger : « Jésus lui répondit : Ma doctrine n'est pas de moi, mais de celui qui m'a envoyé. »
Ou bien encore, il dit : « Ma doctrine, » parce qu'il l'avait enseignée, et il déclare qu'elle n'est pas de lui, parce que c'était la doctrine du Père. Mais si tout ce qui appartient au Père lui appartient également, dès lors que cette doctrine est la doctrine du Père, elle devrait être la sienne ? Sans doute, mais en disant : « Elle n'est pas la mienne. » Il affirme énergiquement que son Père et lui n'ont qu'une seule et même doctrine ; comme s'il disait : Il n'y a aucune différence entre la doctrine de mon Père et la mienne ; et dans mes paroles comme dans mes actions, je fais en sorte qu'on ne remarque rien qui soit contraire, soit aux paroles, soit à la manière d'agir de mon Père.
Ou bien encore, tel est le sens de ces paroles : Bannissez de vos cœurs la colère, l'envie, la haine que vous nourrissez injustement contre moi, et rien alors ne vous empêchera de connaître que mes paroles sont-les paroles mêmes de Dieu. Il apporte ensuite une autre preuve non moins forte qu'il puise pour notre instruction dans la conduite ordinaire des hommes : « Celui qui parle de soi-même cherche sa propre gloire, » c'est-à-dire, celui qui veut établir une doctrine qui lui est personnelle, n'a point d'autre but que d'acquérir de la gloire. Si donc je cherche la gloire de celui qui m'a envoyé, pour quelle raison voudrais-je vous enseigner une doctrine étrangère ? c'est le sens des paroles qui suivent : « Mais qui cherche la gloire de celui qui l'a envoyé est digne de foi, et il n'y a point en lui d'imposture. »