Jean 7, 13
Toutefois, personne ne parlait ouvertement de lui, par crainte des Juifs.
Toutefois, personne ne parlait ouvertement de lui, par crainte des Juifs.
Restriction intéressante, qui nous permet de juger de l'état moral des Juifs à cette époque. « Personne », à
quelque groupe qu'il appartînt. - Ne parlait de lui publiquement. On n'osait donc pas exprimer tout haut un
jugement quelconque au sujet de Jésus. Remarquez la crainte permanente, universelle qu'inspiraient les
hiérarques. Ces hommes terrorisaient vraiment la foule sous le rapport religieux ; or, bien que leur hostilité
contre Notre-Seigneur fût assez vieille, néanmoins, ils ne s'étaient pas encore prononcés ouvertement contre
lui (Cf. v. 26) : le peuple craignait donc d'afficher d'avance, en ce point délicat, une opinion qui pouvait être
en désaccord avec celle de ses chefs.
Le Seigneur ayant déclaré qu'il n'irait pas à la fête avec ses frères, refuse tout d'abord d'y aller pour ne point s'exposer à la colère des Juifs qui avaient juré sa perte : « Ayant dit ces choses, il demeura en Galilée. » Et il s'y rendit ensuite lui-même : « Et lorsque ses frères furent partis, il alla aussi lui-même à la fête. »
Dans le sens mystique, nous voyons ici que pendant que des hommes charnels cherchent avec empressement la gloire humaine, le Seigneur reste dans la Galilée, dont le nom signifie transmigration, c'est-à-dire qu'il demeure dans ses membres qui passent des vices aux vertus, et font de grands progrès dans la perfection. Le Seigneur se rend lui-même à Jérusalem, parce que les membres du Christ cherchent non pas la gloire de cette vie ; mais celle de la vie éternelle. Mais il s'y rend en secret, parce que toute sa gloire vient de l'intérieur (Ps 44), c'est-à-dire, d'un cœur pur, d'une bonne conscience et d'une foi sincère. (1 Tm 1, 5)
Il n'y est point conduit par un vain désir de gloire humaine, il n'a d'autre but que de leur donner de salutaires enseignements, et de leur rappeler la pensée de la fête éternelle.
Ou bien encore, il monte secrètement, parce qu'il ne cherche pas la faveur des hommes, et ne prend point plaisir à se voir entouré du glorieux cortège de la multitude qui aurait marché à sa suite.
On peut dire encore qu'en se rendant comme en secret à cette fête, Jésus a voulu nous donner une leçon mystérieuse. Toutes les lois et les prescriptions imposées au peuple ancien, et par conséquent la fête des Tabernacles, étaient la figure des choses futures ; or, tout ce qui était pour eux figure, est devenu pour nous une réalité. Jésus se rend donc à cette fête comme en secret, pour figurer qu'il demeurait comme voilé. Au jour même de la fête, le Sauveur demeura caché, parce que ce jour de fête figurait l'exil des membres de Jésus-Christ. N'est-ce pas, en effet, habiter comme dans des tentes, que de regarder cette vie comme un pèlerinage et un exil ? Or, la Scénopégie était la fête des Tabernacles ou des tentes.
Cette rumeur était produite par la diversité des opinions que l'Evangéliste nous fait connaître : « Les uns disaient, c'est un homme de bien ; non, disaient les autres, il séduit la foule. » Ainsi qu'un homme se distingue par quelque mérite extraordinaire, tel est le jugement qu'on portera de lui ; les uns diront : C'est un homme de bien ; les autres : Il séduit le peuple. Mais quelle consolation pour un chrétien, de penser que ce qu'on dit de lui on l'a dit auparavant de Jésus-Christ ! En effet, s'ils donnent au mot séduire le sens de tromper, il est évident que Jésus-Christ n'est pas un séducteur ; mais si séduire, c'est simplement amener quelqu'un par la persuasion à son sentiment, il faut pour apprécier cette action, examiner d'où l'on part et où l'on arrive. Celui qui entraîne du bien au mal est un mauvais séducteur ; celui qui ramène du mal au bien est un bon séducteur, et plût à Dieu qu'on nous appelle et que nous soyons en effet des séducteurs de cette sorte.
La haine et l'aversion qu'ils ont pour lui les empêchent même de prononcer sou nom. « Où est-il ? » Quel grand respect pour la fête, quel esprit de religion ! ils veulent profiter de cette solennité pour se saisir frauduleusement du Sauveur.
Voyez la corruption des chefs de la nation, et la timidité du peuple qui leur est soumis ; il a des idées plus droites, et il n'ose les manifester, ce qui est un des caractères de la multitude.
Ou bien, il se rend à cette fête, non pour souffrir, mais pour instruire. Il y vient secrètement, il aurait pu sans doute s'y rendre publiquement, et maîtriser les efforts désordonnés de leur colère, comme il le fit souvent dans d'autres circonstances, mais il ne voulait pas faire un usage continuel de sa puissance, pour ne pas dévoiler sa divinité d'une manière trop éclatante, pour rendre plus certain le mystère de son incarnation, et nous enseigner la pratique de la vertu. C'est donc pour nous apprendre ce que nous devons faire, à nous, qui ne pouvons arrêter les efforts de nos persécuteurs, qu'il se rend secrètement à cette fête. L'Evangéliste ne dit pas : En secret, mais : « Comme en secret, » pour nous montrer qu'il agissait ici par un dessein tout particulier de sa Providence. En effet, s'il avait toujours agi comme Dieu, comment pourrions-nous savoir ce que nous devons faire, lorsque nous sommes aux prises avec les dangers ?
A mon avis, c'était le peuple qui le proclamait un homme de bien, tandis que l'opinion défavorable était celle des chefs du peuple et des prêtres, comme le prouve d'ailleurs leur manière de s'exprimer, car ils ne disent pas : Il nous séduit, mais : « Il séduit la foule. » « Cependant personne ne parlait ouvertement en sa faveur par crainte des Juifs. » C'était surtout ceux qui disaient : « C'est un homme de bien, » plutôt que ceux qui le traitaient de séducteur; ces derniers s'exprimaient plus ouvertement, tandis que les autres ne disaient qu'à voix basse : « C'est un homme de bien. »