Jean 2, 8
Il leur dit : « Maintenant, puisez, et portez-en au maître du repas. » Ils lui en portèrent.
Il leur dit : « Maintenant, puisez, et portez-en au maître du repas. » Ils lui en portèrent.
Le maître d’hôtel est appelé dans l’original architriclin, mot qu’on a francisé et qui vient d’archê, commandement et de triclinion, lit où l’on se couchait pour prendre ses repas. L’architriclin était l’intendant du festin, il était chargé de tout surveiller et de tout diriger.
Second ordre du Seigneur Jésus, communiqué avec une noble et divine assurance : Puisez
maintenant… Le miracle est maintenant accompli. En quoi avait-il consisté ? En une transsubstantiation
rapide, opérée par la seule volonté du thaumaturge, qui avait produit en un instant, comme le disent à l’envi
les Pères, la lente série de phénomènes par lesquels Dieu nous donne chaque année le vin. « Celui qui en ce
jour de noces a changé l’eau en vin dans ces six urnes qu’il avait ordonné de remplir, est le même qui chaque
année opère dans les vignes un prodige pareil. En effet, comme l’eau versée dans les urnes par les serviteurs
a été convertie en vin par l’œuvre du Seigneur, ainsi par l’œuvre du même Seigneur l’eau que versent les
nuées est convertie en vin. Ce dernier prodige ne nous étonne point, parce qu’il se renouvelle tous les ans ».
S. August. Tract. 8 in Evang. Joan. Cf. Serm. 123, 3 ; saint Jean Chrysost. Hom. 22 in Joan. ; saint Greg. le
Gr. Moral. 6, 15. Les interprétations naturalistes (Venturini, Paulus, Gfroerer, Renan, von Ammon), d’après
lesquelles Jésus ou Marie auraient fait apporter en secret une provision de vin pour égayer et honorer les
convives, l’interprétation symbolique de Strauss (ce prétendu miracle a été inventé pour prêter à Jésus un
acte analogue à l’adoucissement des eaux amères par Moïse, Ex. 15, 23, et par Elisée, 4 Reg. 2, 19), l’interprétation symbolique de Baur (le narrateur a voulu exprimer sous une gracieuse allégorie que le temps
était venu où Jésus devait laisser l’eau de son ministère préparatoire pour le breuvage plus substantiel de
l’activité messianique), et toutes les autres explications du rationalisme aux abois, sont simplement
« absurdes », comme le dit énergiquement le docteur américain Jacobus. Il suffit de les exposer pour en
montrer le ridicule. M. Vigouroux les a savamment réfutées en principe dans ses beaux ouvrages, La Bible et
les découvertes modernes, t. 1, et Mélanges bibliques, Paris, 1883, p. 125 et suivantes. Voyez aussi Dehaut,
L’Évangile expliqué, défendu, médité, 5e éd. T. 1, p. 594 et suiv. W. Meyer, peu suspect en ces sortes de
choses, fait ici un aveu plein de franchise : « Le changement de l’eau en vin aux noces de Cana doit être
considéré comme un vrai miracle, car c’est comme un miracle que Jean, témoin oculaire, l’expose avec la
plus parfaite précision. Toute explication qui écarterait le surnaturel est contraire aux paroles et à la tendance
du narrateur, blesse sa véracité, bien plus, présente sous un jour douteux le caractère de Jésus-Christ
lui-même ». Comment., h. l. - Et portez-en au maître du festin. Autre mot grec latinisé, qui signifie : chef du
« tricilinium », par conséquent du festin. Mais deux personnages très distincts pouvaient être ainsi désignés.
C’eût été, d’après Alford, Wordsworth, Trench et d’autres auteurs qui s’appuient sur Eccli. 32, 1, 2, le
« modimperator » ou «arbiter bibendi » des classiques, choisi parmi les convives et chargé d’égayer le festin.
Cf. Xenoph., Anab. 6, 1, 30. Suivant une autre opinion, plus ancienne et que nous croyons beaucoup plus
probable, il s’agirait seulement du premier des serviteurs (Juvencus), du maître d’hôtel, ainsi qu’on le
nomme dans les grandes maisons, chargé de l’ordonnance des repas, de la succession régulière des mets et
des vins. Les anciens l’appelaient « tricliniarchus », « praifectus triclinii » (Pétrone, 27). Il devait déguster
d’avance tout ce qui paraissait sur la table (« praegustator »), le vin surtout, afin d’en reconnaître la qualité.
Cf. v. 9 Voilà pourquoi Jésus lui fait porter l’eau miraculeusement transsubstantiée. Gerlach, Watkins, etc.,
supposent que le prodige aurait seulement atteint la quantité d’eau puisée par les serviteurs conformément à
l’ordre de Jésus dans ce verset : c’est un scrupule indigne du divin Maître.