Jean 15, 21

Les gens vous traiteront ainsi à cause de mon nom, parce qu’ils ne connaissent pas Celui qui m’a envoyé.

Les gens vous traiteront ainsi à cause de mon nom, parce qu’ils ne connaissent pas Celui qui m’a envoyé.
Louis-Claude Fillion
Mais... Cette particule introduit une grande consolation : non seulement les apôtres auront à souffrir comme Jésus, mais c’est pour lui qu’ils souffriront. - Ils vous : toutes les persécutions qui les attendent. Voyez-en le détail un peu plus bas (16, 2) et surtout dans S. Matthieu, 10, 16 et ss. - Vous feront. Le langage a cessé d’être conjectural : ce sont des choses certaines que Jésus prophétise à ses amis. - À cause de mon nom. Son nom représente ici sa personne même ; au reste, le monde les a toujours eux l’un et l’autre en horreur. Cf. Act. 4, 17-18 ; 9, 5, etc. L’histoire du premier siècle montre que les apôtres se souvinrent de cette précieuse leçon ; partout, nous les voyons souffrir avec joie pour le nom sacré de leur Maître. Cf. Act. 5, 41 ; 21, 13 ; 2 Cor. 12, 19 ; Gal. 6, 17 ; 1 Petr. 4, 12 et ss. - Parce qu’ils… Le Sauveur signale un des motifs spéciaux de la haine que lui porte le monde : c’est une grande ignorance de Dieu et des choses de Dieu : ils ne connaissent pas celui qui m’a envoyé. Voyez 7, 28, où Jésus adressait directement aux Juifs ce même reproche. Si le monde avait eu de Dieu une connaissance pratique, s’il l’avait aimé, servi, il aurait facilement reconnu, servi, aimé N.-S. Jésus-Christ, qui donnait des preuves si manifestes de sa mission céleste. Rempli d’idées fausses sur Dieu, le monde avait été aveugle relativement au vrai rôle de Jésus.
Saint Thomas d'Aquin
2039. Le Seigneur développe ici les raisons qu'il vient de donner pour la consolation des disciples : la première, qui se rapporte à son propre exemple, puis la seconde, qui concerne la haine du monde [n° 2043].

Le Seigneur rappelle d'abord la diversité de rang entre lui et ses disciples ; puis il montre la similitude des faits [n° 2042].

2040. Il y avait une différence de rang entre le Christ et ses disciples, parce que lui était le Seigneur, et eux, des serviteurs. Il rappelle donc cette différence lorsqu'il dit : SOUVENEZ-VOUS DE LA PAROLE QUE MOI, JE VOUS AI DITE précédemment, à savoir : Le serviteur n'est pas plus grand que son Seigneur. Cela ne doit donc pas vous indigner si vous souffrez ce que votre Seigneur a souffert ; vous devez au contraire le considérer comme une grande gloire. Voilà pourquoi, selon Matthieu, aux disciples qui demandent de siéger l'un à sa droite et l'autre à sa gauche, il dit : Pouvez-vous boire la coupe que moi, je suis destiné à boire ? - C'est une grande gloire de suivre le Seigneur. - II suffit au disciple d'être comme son maître*'.

2041. Mais plus haut, le Seigneur ne disait-il pas au contraire : Je ne vous appellerai plus serviteurs, alors qu'ici il déclare : LE SERVITEUR N'EST PAS PLUS GRAND QUE SON SEIGNEUR ?

Je réponds en disant qu'il y a une double servitude : l'une qui procède de la crainte servile, c'est-à-dire de la crainte du châtiment et, en ce sens, les Apôtres n'étaient pas serviteurs ; l'autre qui procède de la crainte chaste, et une telle servitude existait chez les Apôtres - Bienheureux les serviteurs que le maître, à sa venue, trouvera en train de veiller.

2042. Si donc vous êtes des serviteurs et moi le Seigneur, vous devez être contents qu'on vous fasse ce qu'on m'a fait. Or moi, certains m'ont méprisé, et d'autres m'ont reçu - Il est venu chez lui, et les siens ne Vont pas reçu. Mais à tous ceux qui Vont reçu, il a donné pouvoir de devenir enfants de Dieu. Vous aussi, de même, si certains vous méprisent, d'autres cependant vous honoreront.

Voilà pourquoi le Seigneur dit : S'ILS M'ONT PERSÉCUTÉ, VOUS AUSSI ILS VOUS PERSÉCUTERONT. Par ces mots, il expose la similitude des faits ; en effet, que leur persécution s'exerce sur les disciples ou sur le Christ, la raison en est la même, puisque dans les disciples, c'est le Christ qu'ils persécutent. Lors de la persécution de ses disciples, le Christ le disait bien : Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu ? Et c'est pourquoi, du fait de l'identité de cause, suit cette conséquence : S'ILS M'ONT PERSÉCUTÉ, VOUS AUSSI ILS VOUS PERSÉCUTERONT - S'ils ont traité le maître de maison de Béelzéboul, combien plus le feront-ils pour les gens de sa maison ? Au sujet de cette persécution, il est dit : Voici que moi, j'envoie vers vous des sages et des scribes. Vous en tuerez et crucifierez, vous en fouetterez dans vos synagogues, et en pourchasserez de ville en ville.

En ce qui concerne l'honneur, la raison est également la même. Aussi le Seigneur dit-il : S'ILS ONT GARDÉ MA PAROLE, ILS GARDERONT AUSSI LA VÔTRE, car VOS paroles sont mes paroles - Vous cherchez à tester celui qui parle en moi, le Christ. - Ce n'est pas vous en effet qui parlez, mais l'Esprit de votre Père qui parle en vous -, c'est pourquoi il dit : Qui vous écoute, m'écoute.

Que les Apôtres aient été reçus et honorés par certains, on le voit clairement : Et vous, quand vous avez reçu de nous la parole de Dieu que nous vous faisions entendre, vous l'avez accueillie non comme une parole d'hommes, mais selon ce qu'elle est vraiment, la parole de Dieu .

2043. Ici le Seigneur explique la raison de la consolation des disciples, liée à la cause de la haine. Les Apôtres, en effet, avaient été choisis et élevés au-dessus du monde, en tant qu'ils avaient été rendus participants de la divinité et unis à Dieu ; et c'est parce qu'ils étaient au-dessus du monde et unis à Dieu que le monde les avait en haine : il s'ensuit que le monde haïssait plutôt Dieu dans les Apôtres que les Apôtres eux-mêmes. Et la cause de cette haine, c'est qu'ils n'avaient pas la vraie connaissance de Dieu, celle qui s'acquiert par une foi vraie et un amour livré sans réserve. D'ailleurs, s'ils les avaient reconnus comme amis de Dieu, ils ne les auraient pas persécutés. Et voilà pourquoi le Seigneur dit : TOUT CELA, la haine et la persécution à votre égard, ILS VOUS LE FERONT À CAUSE DE MON NOM, et donc cela doit être pour vous un sujet de gloire - Qu'aucun de vous ne souffre comme meurtrier, ou voleur, ou médisant, ou envieux des biens d'autrui ; mais si c'est comme chrétien, qu’il ne rougisse pas, qu'il glorifie Dieu pour ce nom . Tout cela, ils le feront À CAUSE DE MON NOM, non pas qu'ils l'aiment, mais parce qu'ils l'ont en haine ; tandis que vous, au contraire, vous souffrirez à cause de mon nom parce que vous l'aimez. Et ils feront cela PARCE QU'ILS NE CONNAISSENT PAS CELUI QUI M'A ENVOYÉ - Si vous me connaissiez, vous connaîtriez peut-être aussi mon Père ! Ils ne savaient pas, en effet, qu'il était agréable à Dieu qu'ils adhèrent au Christ.

Mais remarquons qu'il parle ici de la connaissance parfaite, consistant dans la foi qui mène l'intelligence à son achèvement et unit la volonté aimante à Dieu. D'une telle connaissance il est dit : Celui qui se glorifie, qu'il se glorifie de ceci : de la science et de la connaissance qu'il a de moi. - Te connaître, c'est l'intelligence accomplie.
Saint Théophylacte d'Ohrid
S'ils ont persécuté le Seigneur, à plus forte, raison, vous persécuteront-ils, vous, ses serviteurs; s'ils ne l'avaient point persécuté et qu'ils eussent gardé sa parole, ils auraient aussi gardé la vôtre.
La Glose
Ils ont suivi la même conduite pour la calomnie, selon ces paroles: «Le pécheur observera le juste» ( Ps 36)
Saint Grégoire le Grand
Le blâme des méchants est une approbation de notre vie, c'est une marque évidente que nous commençons à avoir quelque justice, lorsque nous commençons à déplaire à ceux qui ne plaisent pas à Dieu; car personne ne peut dans une seule et même chose être agréable tout à la fois à Dieu et à ses ennemis; c'est renier le titre d'ami de Dieu que de plaire à ses ennemis, et on est ouvertement opposé aux ennemis de la vérité, lorsqu'on est intérieurement soumis au règne de cette même vérité.
Saint Augustin
Notre-Seigneur venait de dire:» Je vous ai établis pour que vous alliez et que vous rapportiez du fruit». La charité est le fruit que nous devons produire, et Jésus-Christ nous en fait un précepte formel: «Ce que je vous commande, est de vous aimer les uns les autres». C'est pour cela que l'Apôtre nous dit: «Le fruit de l'esprit, c'est la charité», ( Ga 5) et il nous représente toutes les autres vertus sortant de cette source et se rattachant à ce lien de la charité. Notre-Seigneur nous recommande donc avec raison la charité, comme si elle était le seul précepte sans laquelle tout le reste est inutile et qui amène nécessairement avec elle tous les autres biens qui constituent la bonté de l'homme.

Pourquoi, en effet, les membres s'élèveraient-ils au-dessus de leur chef? Vous refusez de faire partie du corps, si vous ne voulez pas souffrir la haine du monde avec votre chef; or, nous devons souffrir patiemment cette haine pour l'accomplissement du précepte de l'amour, car le monde doit nécessairement nous haïr en voyant que nous ne voulons point de ce qu'il aime, ainsi que le dit le Sauveur: «Si vous étiez du monde, le monde aimerait ce qui est à lui».

Ces paroles s'appliquent à toute l'Eglise, qui est souvent désignée sous le nom du monde, comme dans ce passage: «Dieu était dans le Christ, se réconciliant le monde». ( 2Co 5,19 ) L'Eglise est donc le monde entier, et c'est le monde entier qui hait l'Eglise. C'est donc le monde qui hait le monde, le monde ennemi qui hait le monde réconcilié, le monde réprouvé qui hait le monde sauvé, le monde souillé qui hait le monde purifié

Mais puisque les méchants tourmentent aussi les méchants (ainsi les rois et les juges impies, tout en persécutant les bons, punissent aussi les homicides et les adultères); ces paroles du Sauveur: «Si vous étiez du monde, le monde aimerait ce qui est à lui», doivent s'entendre dans ce sens, que le monde est dans ceux, qui punissent de tels crimes, et qu'il est aussi dans ceux qui les aiment. Le monde a donc de la haine pour ce qui est à lui, en tant qu'il châtie les coupables, et il aime ce qui vient de lui en ce qu'il favorise les mêmes crimes.

Si l'on demande quelle affection peut avoir pour lui-même ce monde de perdition qui n'a que de la haine pour le monde de la rédemption, je répondrai qu'il s'aime d'une affection qui n'a rien de vrai, parce qu'il aime ce qui lui est nuisible. Il déteste eu lui la nature et n'aime que le vice. Aussi nous est-il défendu d'aimer ce qu'il aime en lui-même, tandis que Dieu nous commande d'aimer ce qu'il déteste, c'est-à-dire, qu'il nous est défendu d'aimer en lui le vice, et commandé d'aimer la nature. Or, c'est pour tirer les disciples de ce monde de perdition que Dieu les a choisis, et il les a choisis, non à cause de leurs mérites, puisqu'ils n'avaient aucune bonne oeuvre à présenter, ni à cause de leur nature, qui avait été profondément viciée dans la racine, mais il les a choisis uniquement par grâce: «Parce que vous n'êtes pas du monde, et que je vous ai choisis du milieu du monde, à cause de cela le monde vous hait».

Notre-Seigneur, pour encourager ses serviteurs à supporter patiemment la haine du monde, ne leur a point proposé d'exemple plus grand et plus efficace que le sien: «Souvenez-vous de la parole que je vous ai dite: Le serviteur n'est pas plus grand que son maître; s'ils m'ont persécuté, ils vous persécuteront aussi», etc.

Lorsque le Sauveur dit: «Le serviteur n'est pas au-dessus de son maître», il veut parler du serviteur qui est rempli de cette crainte chaste et sainte qui demeure éternellement ( Ps 18)

Quelles sont toutes ces choses? celles dont il vient de parler, la haine, les mauvais traitements, et le mépris qu'on fera de leur parole: «Ils vous feront toutes ces choses; à cause de mon nom», n'est-ce pas dire équivalemment: c'est moi qu'ils poursuivront de leur haine dans votre personne, c'est moi qu'ils persécuteront en vous persécutant, et ils ne garderont pas votre parole, parce qu'elle est la mienne. Ceux qui vous feront ces mauvais traitements à cause de mon nom, sont donc d'autant plus malheureux, que le bonheur de ceux qui les souffrent à cause de mon nom est plus grand. Les méchants les font endurer également aux méchants, et ils sont misérables les uns comme les autres, ceux qui font souffrir comme ceux qui souffrent. Mais comment Notre-Seigneur a-t-il pu dire: «Ils vous feront toutes ces choses à cause de mon nom», alors que ces impies n'agissent point pour le nom de Jésus-Christ, c'est-à-dire, par un motif de justice, mais par amour de l'iniquité? Si on applique exclusivement ces paroles aux justes, voici comme on peut résoudre cette question: «Vous souffrirez toutes ces choses à cause de mon nom». Mais si on entend ces paroles dans ce sens: «Ils vous feront toutes ces choses à cause de mon nom». qui est en vous l'objet de leur haine», on peut leur donner cette signification: A cause de la justice qu'ils ne peuvent s'empêcher de haïr dans votre personne. Par la même raison, lorsque les bons sont obligés de persécuter les méchants, ils le font, et à cause de la justice dont ils défendent les intérêts en châtiant les méchants, et à cause de l'iniquité qu'ils détestent dans leur personne. Notre-Seigneur ajoute: «Parce qu'ils ne connaissent pas celui qui m'a envoyé», et cette connaissance est celle dont il est écrit: «Vous connaître, c'est la parfaite prudence».
Saint Jean Chrysostome
Il leur donne encore un nouveau motif de consolation, c'est que les outrages qu'ils reçoivent s'adressent on même temps à Dieu le Père: «Mais ils vous feront toutes ces choses à cause de mon nom, parce qu'ils ne connaissent point celui qui m'a envoyé».

On peut encore rattacher autrement ces paroles à ce qui précède: «Je vous ai dit que je donnais ma vie pour vous, et que je vous ai choisis le premier. Ce n'est point pour vous faire un reproche que je vous ai parlé de la sorte, mais pour vous engager à un tendre amour les uns pour les autres. Et comme il est toujours pénible d'être en butte à la persécution et aux outrages, il leur prouve que loin de s'en plaindre, ils doivent s'en réjouir: «Si le monde vous hait, leur dit-il, sachez qu'il m'a haï le premier», c'est-à-dire, je sais que la haine est toujours dure à supporter, mais souffrez-la à cause de moi.

Comme le motif de souffrir pour Jésus-Christ ne suffisait pas encore pour contrebalancer leurs craintes, il en ajoute un autre, c'est que c'est une preuve incontestable de vertu d'être haï du monde, et nous devrions gémir et nous attrister si nous en étions aimés, car ce serait un signe évident de notre dépravation.

C'est-à-dire, en d'autres termes: Ne vous troublez point, si vous avez part à mes souffrances, parce que vous n'êtes pas au-dessus de moi.