Jean 12, 37
Alors qu’il avait fait tant de signes devant eux, certains ne croyaient pas en lui.
Alors qu’il avait fait tant de signes devant eux, certains ne croyaient pas en lui.
C'est un regard général que S. Jean jette ici sur tous les miracles accomplis par Notre-Seigneur. - Tant de
miracles. L'adjectif grec Τοσαῦτα, dans le quatrième évangile, est toujours relatif à la quantité. Cf. 6, 9 ; 14,
9 ; 21, 11. - Notre évangéliste n'a pourtant raconté jusqu'ici que six miracles de Jésus, et il se contentera d'en
ajouter un septième au chapitre 21 ; mais l'ensemble de sa narration en suppose un nombre considérable. Cf.
7, 31 ; 11, 47 ; 20, 30, etc. Sur le mot « miracle » (σημεῖα), qui caractérise si bien le but des prodiges opérés
par N.-S Jésus-Christ, voyez la note de 2, 11. - Devant eux : sous leurs yeux, en leur présence. Circonstance
qui rendait l'incrédulité tout à fait inexcusable. Cf. Act. 26, 26. Les miracles de Jésus avaient eu en effet une
publicité étonnante. - Ils ne croyaient pas... Cette conclusion de la phrase est empreinte d'une poignante
tristesse. Remarquez l'imparfait de la durée, qui dénote une terrible opiniâtreté dans le refus de la foi. Cf. 1
10, 11.
À l'égard de ceux qui ne croyaient pas du tout, il commence par montrer la dureté étonnante de leur incrédulité ; puis, pour qu'on ne croie pas que cela se fit d'une manière irrationnelle ou fortuite, il introduit une prophétie [n° 1690].
La dureté étonnante de leur incrédulité.
1689. L'Évangéliste dit donc, comme en s'étonnant : il est dit que le Seigneur fait beaucoup de signes, par exemple qu'il a changé l'eau en vin’, qu'il a guéri un paralytique , qu'il a illuminé un aveugle, qu'il a ressuscité un mort, et cependant BIEN QU'IL EÛT FAIT TANT DE SIGNES DEVANT EUX, ILS NE CROYAIENT PAS EN LUI – Ils disaient donc : Quel signe fais-tu donc pour que nous voyions et croyions en toi ? Mais voici ce que dit l'Évangéliste : BIEN QU'IL EÛT FAIT TANT DE SIGNES DEVANT EUX, ILS NE CROYAIENT PAS EN LUI - Si je n'avais fait parmi eux les œuvres que nul autre n'a faites, ils n'auraient pas de péché. Aussi ne pouvaient-ils pas dire ceci : Nous n'avons plus vu de signes.
La prophétie d'haïe.
1690. En vue de cela sont introduits les témoignages des prophètes, et après avoir cité les prophéties l'Évangéliste montre qu'elles parlent du Christ [n° 1703].
II cite d'abord la prophétie prédisant leur incrédulité, puis il ajoute celle qui prédit la cause de cette incrédulité [n° 1697].
1691. Il dit donc : je dis qu'ils ne croyaient pas en lui, POUR QUE S'ACCOMPLÎT LA PAROLE QUE LE PROPHÈTE ISAÏE AVAIT DITE.
Ici il faut savoir que l'expression « pour que » dans les Saintes Écritures a tantôt un sens causal, comme plus haut : Moi je suis venu pour que mes brebis aient la vie ; tantôt un sens consécutif, et signifie alors un événement futur. Et c'est en ce sens qu'elle est prise ici. En effet ce n'est pas parce qu'Isaïe l'avait prédit qu'ils ne croyaient pas mais c'est parce qu'ils n'allaient pas croire qu'il l'a prédit ; ainsi c'est à partir des non-croyants que la parole d'Isaïe est accomplie - II faut que s'accomplisse tout ce qui est écrit de moi dans la Loi de Moïse, les Prophètes et les Psaumes. - Un seul iota ou un seul point de la Loi ne passera pas que tout ne soit accompli*.
1692. Mais s'il était nécessaire que s'accomplît la parole d'Isaïe, il semble que les Juifs soient excusables de ce qu'ils n'ont pas cru : en effet, ils ne pouvaient aller contre la prophétie.
Je réponds : il faut dire qu'ainsi était prophétisé qu'ils useraient de leur libre arbitre. En effet Dieu, qui connaît par avance les choses futures, a prédit par le prophète leur incrédulité, mais ce n'est pas lui qui en est l'auteurce n'est pas parce qu'il connaît déjà les péchés futurs des hommes que Dieu force quelqu'un à pécher. Ce péché, donc, que les Juifs ont commis, le Seigneur, à qui rien n'est caché, a prédit qu'ils allaient le commettre.
1693. Il ajoute ensuite ce que dit le prophète : SEIGNEUR, QUI A CRU À CE QUI A ÉTÉ ENTENDU DE NOUS, ET LE BRAS DU SEIGNEUR, À QUI A-T-IL ÉTÉ RÉVÉLÉ ?
Il faut savoir ici qu'il y a deux manières de croire. Parfois c'est par l'instruction d'un autre - et c'est là la manière commune de croire - La foi vient de ce qu’on entend, et on entend par la parole du Christ. Parfois par une révélation divine, ce qui est un mode particulier dont l'Apôtre dit : Ce n'est pas non plus d'un homme que je l'ai reçu ou appris, mais par une révélation de Jésus Christ*.
1694. Isaïe a donc prédit que les croyants seraient rares, en disant : SEIGNEUR, QUI A CRU ? Et en premier lieu quant à la manière commune, c'est-à-dire par l'instruction, quand il dit : QUI A CRU À CE QUI A ÉTÉ ENTENDU DE NOUS ? Et ce verset d'Isaïe peut se comprendre de deux façons.
D'une première façon en ce sens : QUI A CRU À CE QUI A ÉTÉ ENTENDU DE NOUS ? à savoir ce que nous avons entendu de toi - Nous avons entendu du Seigneur des armées un message. - J'entendrai ce que dit en moi le Seigneur Dieu. Autrement dit : nous, nous l'avons entendu de toi, mais. Seigneur, qui croira ce que nous avons entendu de ta bouche au sujet de ta nativité et de ta Passion ? C'est aussi pourquoi tout ce chapitre d'Isaïe parle de ces choses.
Or il dit que les prophètes entendent, pour faire comprendre la manière dont les prophètes sont illuminés. En effet, par la vision l'homme reçoit immédiatement une connaissance de la réalité vue, tandis que par l'ouïe la connaissance ne provient pas immédiatement de la réalité vue, mais d'un signe de cette réalité. Donc, parce que les prophètes ne voyaient pas immédiatement l'essence divine mais seulement des signes des réalités divines, il dit qu'ils entendent - Si quelqu'un parmi vous est prophète du Seigneur, je lui apparaîtrai dans une vision ou je lui parlerai en songe, c'est-à-dire par des signes. Or le Fils voit éternellement l'essence divine elle-même - Personne n'a jamais vu Dieu ; le Fils unique qui est dans le sein du Père, lui, l’α fait connaître*. QUI donc A CRU À CE QUI A ÉTÉ ENTENDU DE NOUS ? à savoir : qui a cru ce que nous avons entendu et fait connaître ? - Ce que j'ai entendu du Seigneur des armées, le Dieu d'Israël, je vous l'ai annoncé.
D'une autre façon : QUI A CRU À CE QUI A ÉTÉ ENTENDU DE NOUS ? c'est-à-dire ce qu'ils entendent de nous - Ils entendent mes paroles de ta bouche et ne les observent pas.
1695. Quant au mode particulier de croire, c'est-à-dire par une révélation, il dit : ET LE BRAS DU SEIGNEUR, À QUI A-T-IL ÉTÉ RÉVÉLÉ ? Le Fils est appelé « bras », lui par qui le Père opère toutes choses, comme on appelle bras de l'homme ce par quoi l'homme opère. Et si l'homme opérait par un seul verbe intérieur, alors ce verbe pourrait être appelé son bras. Ainsi donc le Fils est appelé le bras de Dieu, non que Dieu le Père soit déterminé par une figure de chair humaine et qu'il ait un bras corporel, mais parce que Tout a été fait par lui. - Ton bras est-il comme celui de Dieu, et ta voix peut-elle tonner comme la sienne ? - II a déployé la force de son bras.
1696. Notons que cette parole a été l'occasion de l'erreur de Sabellius, qui a dit que le Père et le Fils sont une même personne, et aussi de l'erreur d'Arius, disant que le Fils est moindre que le Père. En effet, un homme et son bras ne forment pas deux personnes mais une seule ; et on ne peut dire que le bras soit égal à l'homme.
Il faut répondre en disant qu'en de telles choses il n'y a pas de similitude suffisante : car ce qui se trouve dans les créatures ne représente pas parfaitement ce qui est en Dieu. C'est pourquoi Denys dit que la théologie symbolique n'est pas argumentative. Le Fils n'est donc pas appelé « bras » comme s'il était la même personne que le Père, ou moins grand que lui, mais parce que par lui le Père opère tout. Il dit donc : ET LE BRAS DU SEIGNEUR, À QUI A-T-IL ÉTÉ RÉVÉLÉ ?, comme s'il disait : à un petit nombre, à savoir aux Apôtres eux-mêmes - Car c'est à nous que Dieu l’α révélé par son Esprit.
1697. Jean cite ensuite la prophétie prédisant la cause de leur incrédulité. Et si nous sommes attentifs à ces paroles de l'Évangéliste, il semble bien, à première vue, qu'elles aient une signification obscure.
D'abord parce que s'il est dit : VOILÀ POURQUOI ILS NE POUVAIENT PAS CROIRE, ce qu'Isaïe a dit, les Juifs semblent être excusables. En effet, quel est le péché de l'homme qui ne fait pas ce qu'il ne peut pas faire ? Et, ce qui est plus grave, on fait retomber la faute sur Dieu, parce qu'IL A AVEUGLÉ LEURS YEUX et leur cœur. Ce serait tolérable si on disait cela du diable, puisque le dieu de ce monde a aveuglé l'esprit des infidèles. Mais ici on dit cela de notre Seigneur ! Car Isaïe dit : Je vis le Seigneur siégeant sur un trône sublime et élevé . Et plus loin : Aveugle le cœur de ce peuple, rends-le dur d'oreille, bouche-lui les yeux, de peur que ses yeux ne voient, que ses oreilles n'entendent, que son cœur ne comprenne, qu'il ne se convertisse et ne soit guéri.
1698. Pour bien comprendre cela, expliquons d'abord ce que dit l'Évangéliste : VOILÀ POURQUOI ILS NE POUVAIENT PAS CROIRE. Il faut savoir que quelque chose est dit impossible ou nécessaire de deux manières : d'une manière absolue et d'une manière relative. D'une manière absolue, comme il est impossible qu'un homme soit un âne ; d'une manière relative, comme il est impossible que je sois à l'extérieur de la maison si je suis à l'intérieur. En fonction de cela, il faut donc dire qu'un homme est excusé s'il ne fait pas les choses qui, d'une manière absolue, lui sont impossibles. Mais s'il ne fait pas celles qui lui sont impossibles d'une manière relative, il n'est pas excusé. Ainsi, si l'on rapporte que quelqu'un a vraiment la mauvaise volonté de voler et qu'il dit qu'il lui est impossible de ne pas pécher tant qu'il a cette volonté, il n'est pas excusé ; parce qu'une impossibilité de cette sorte n'est pas absolue mais relative : en effet il peut abandonner cette mauvaise volonté. Il est donc dit : VOILÀ POURQUOI ILS NE POUVAIENT PAS CROIRE comme s'ils avaient, dans leur malice, une volonté aveuglée - Si l'Éthiopien peut changer sa peau ou le léopard ses taches, alors vous aussi pourrez bien faire, quoique vous ayez appris le mal. - Comment pourriez-vous faire le bien, vous qui êtes mauvais ? Et c'est la même chose que si je disais de quelqu'un : moi, en aucune manière je ne peux l'aimer, mais je l'ai en haine.
Quant à la deuxième partie de la prophétie, il faut savoir que l'aveuglement et l'endurcissement venant de Dieu ne s'entendent pas comme si Dieu suscitait la malice ou qu'il poussait à pécher, mais du fait qu'il n'infuse pas sa grâce, grâce qu'il infuse par sa miséricorde. Mais la raison pour laquelle il ne l'infuse pas provient de nous, en tant qu'il y a en nous quelque chose qui répugne à la grâce divine. Car lui, quant à ce qu'il est lui-même, illumine tout homme venant en ce monde - Il veut que tous les hommes soient sauvés. Mais c'est parce que nous nous détournons de Dieu qu'il nous retire sa grâce - Parce que tu as, toi, rejeté la science, je te rejetterai. - Ta perte, Israël, provient de toi ; en moi seul ton secours. Et c'est comme si quelqu'un avait fermé la fenêtre de sa maison et qu'on lui disait : Tu ne peux pas voir puisque tu es privé de la lumière du solei1. Or ce ne serait pas à cause d'un manque de soleil, mais parce que lui-même se serait coupé de la lumière du solei1. C'est d'une manière semblable qu'on dit ici qu'ils NE POUVAIENT PAS CROIRE parce que Dieu les a aveuglés : c'est qu'en fait eux-mêmes avaient produit la cause de leur aveuglement - Leur malice les a aveuglés.
1699. Après avoir vu cela il faut considérer les paroles de cette prophétie du livre d'Isaïe, non pas en elles-mêmes mais selon leur signification. Dans ces paroles, donc, sont contenues trois choses : premièrement, l'endurcissement et l'aveuglement des Juifs ; deuxièmement, l'effet de l'un ei de l'autre [n° 1701] ; troisièmement, la fin de cet endurcissement et de cet aveuglement [n° 1702].
1700. À propos du premier point, il faul considérer que le Seigneur amenait à la foi de deux manières : par des miracles et par un enseignement ; c'est pourquoi il les reprend sur ces deux points en disant : Si je n’avais fait parmi eux les œuvres que nui autre n'a faites, ils n'auraient pas de péché. Et encore : Si je n’étais pas venu, et que je ne leur avais pas parlé, ils n'auraient pas dé péché, mais maintenant ils n'ont pas d'excuse à leur péché. Ils ont en effet méprisé l'un et l'autre. Donc, parce qu'ils n'étaient pas attentifs aux miracles du Christ avec la ferveur qu'ils auraient dû avoir, il dit : IL A AVEUGLÉ LEURS YEUX, à savoir : les yeux de leur cœur - Puisse-t-il illuminer les yeux de votre cœur pour qu'ils considèrent pai leur intelligence que de tels miracles ne pouvaient être faits si ce n'est par la puissance divine. - Toi qui as vu tant de choses, tu n'y fais pas attention ? Et : Qui est aveugle, sinon mon serviteur ?
Parce qu'ils n'étaient pas impressionnés par l'enseignement du Christ, il ajoute : ET ENDURCI LEUR CŒUR. Ce qui n'est pas dissous par une forte chaleur ni broyé par un coup violent est à l'évidence très dur. Or les paroles du Christ sont comme un feu, et comme un marteau qui brise la pierre, comme il est dit dans Jérémie. Comme du feu, certes, parce qu'elles enflamment par la charité ; comme un marteau, parce qu'elles effraient par la menace et brisent par la très grande évidence de la vérité. Et pourtant le cœur des Juifs n'était pas attentif à la parole du Christ. Aussi il est manifeste qu'il fut endurci - Son cœur est dur comme l'enclume de celui qui manie le marteau*. - II fait miséricorde à qui il veut, et il endurcit qui il veut.
1701. Il montre ensuite l'effet de leur aveuglement lorsqu'il dit : POUR QU'ILS NE VOIENT PAS DE LEURS YEUX, à savoir ceux de l'esprit, en découvrant la divinité du Christ - Elles ont des yeux et ne voient pas.
Au contraire, il est dit dans Luc : Bienheureux les yeux qui voient ce que vous voyez. Il montre l'effet de leur endurcissement lorsqu'il dit : ET NE COMPRENNENT PAS PAR LE CŒUR, sous-entendu : Pour qu'ils NE COMPRENNENT PAS PAR LE CŒUR - Et parce que pas un ne comprend, ils périront à jamais^. - II n'a pas voulu comprendre de façon à bien agir.
Ici, il faut remarquer que l'expression « pour que » n'est pas prise au sens causal mais au sens consécutif.
1702. Puis il indique la fin de cet aveuglement et de cet endurcissement. Et cela peut se comprendre de deux manières, comme le dit Augustin.
D'une première manière, avec la répétition de la négation, le sens serait : QU'ILS NE SE CONVERTISSENT PAS ET QUE JE NE LES GUÉRISSE PAS. En effet, le chemin de la guérison du péché est la conversion à Dieu - Convertis-nous à toi, Seigneur, et nous serons convertis, et il est ajouté aussitôt : Renouvelle nos jours comme autrefois.
Mais à ceux qui se sont montrés indignes de la rémission de leurs péchés, Dieu n'accorde pas les faveurs par lesquelles ils se convertiraient et seraient guéris, puisque manifestement ils ne les acceptent pas mais les rejettent.
D'une autre manière, sans la répétition de la négation, le sens serait : ils ont été aveuglés et endurcis afin que pour un temps ils ne voient ni ne comprennent ; et qu'ainsi, ne voyant ni ne comprenant, c'est-à-dire ne croyant pas dans le Christ, ils le tuent puis, touchés de componction , se convertissent et soient guéris. Car Dieu permet que quelques-uns parfois tombent dans le péché afin qu'humiliés, ils se rétablissent plus fermement dans la justice.
L'une et l'autre de ces explications se retrouvent chez différents Juifs. La première, chez ceux qui sont demeurés jusqu'au bout dans leur refus de croire ; la deuxième, chez ceux qui, après la Passion du Christ, se sont convertis au Christ et qui, pris de componction en leur cœur par les paroles de Pierre, ont dit aux Apôtres : Frères, que devons-nous faire ?
1703. L'Évangéliste montre ensuite que les paroles de l'Écriture citées auparavant tombent à propos. Car Isaïe a vu en même temps la gloire de Dieu et l'aveuglement des Juifs, comme cela apparaît clairement lorsqu'il dit d'abord : Je vis le Seigneur siégeant sur un trône sublime et élevé, puis ajoute : Aveugle le cœur de ce peuple, rends-le dur d'oreille, bouche-lui les yeux, de peur que ses yeux ne voient, que ses oreilles n'entendent, que son cœur ne comprenne, qu'il ne se convertisse et ne soit guéri. Et parce que ce qu'il avait vu convenait pour qu'il rendît témoignage, on trouve ensuite : ET QU'IL A PARLÉ DE LUI, c'est-à-dire du Christ, dont il a vu la gloire : Tous les prophètes rendent de lui ce témoignage. - Dieu avait promis auparavant [l'Évangile] par ses prophètes dans les Saintes Écritures, au sujet de son Fils.
1704. Concernant les deux premières choses que l'on regarde à présent, il faut prendre garde à l'erreur des ariens qui disent que seul le Père est invisible à toute créature, mais que le Fils a été vu dans les visions de l'Ancien Testament. Mais puisqu'il est dit plus loin : Qui me voit, voit aussi le Père, il est manifeste que c'est d'une seule et même manière que le Fils et le Père sont visibles. Donc, en voyant la gloire du Fils, Isaïe a vu aussi la gloire du Père ; et bien plus, de toute la Trinité qui est un seul Dieu siégeant sur un trône élevé et que les séraphins proclamaient : Saint, saint, saint. Non pas de telle sorte qu'Isaïe ait vu l'essence de la Trinité, mais par une vision de l'imagination, avec son intelligence, il a exprimé des signes de sa majesté - Si quelqu'un parmi vous est prophète du Seigneur, je lui parlerai en songe ou dans une vision.
1705. Ce qui est dit ensuite : ET QU'IL A PARLÉ DE LUI exclut l'erreur des manichéens qui ont dit qu'aucune prophétie de l'Ancien Testament n'a annoncé le Christ, comme Augustin le rapporte, et celle de Théodore de Mopsueste qui a dit que toutes les prophéties de l'Ancien Testament ont été dites au sujet d'autre chose mais rattachées au ministère du Christ par les Apôtres et les Évangélistes, grâce à une certaine adaptation, comme ce qui est dit d'un fait peut être appliqué à un autre.
Or tout cela est exclu par ce qui est dit : ET QU'IL A PARLÉ DE LUI, comme le Christ a dit au sujet de Moïse : C'est de moi qu'il a écrit.
La dureté étonnante de leur incrédulité.
1689. L'Évangéliste dit donc, comme en s'étonnant : il est dit que le Seigneur fait beaucoup de signes, par exemple qu'il a changé l'eau en vin’, qu'il a guéri un paralytique , qu'il a illuminé un aveugle, qu'il a ressuscité un mort, et cependant BIEN QU'IL EÛT FAIT TANT DE SIGNES DEVANT EUX, ILS NE CROYAIENT PAS EN LUI – Ils disaient donc : Quel signe fais-tu donc pour que nous voyions et croyions en toi ? Mais voici ce que dit l'Évangéliste : BIEN QU'IL EÛT FAIT TANT DE SIGNES DEVANT EUX, ILS NE CROYAIENT PAS EN LUI - Si je n'avais fait parmi eux les œuvres que nul autre n'a faites, ils n'auraient pas de péché. Aussi ne pouvaient-ils pas dire ceci : Nous n'avons plus vu de signes.
La prophétie d'haïe.
1690. En vue de cela sont introduits les témoignages des prophètes, et après avoir cité les prophéties l'Évangéliste montre qu'elles parlent du Christ [n° 1703].
II cite d'abord la prophétie prédisant leur incrédulité, puis il ajoute celle qui prédit la cause de cette incrédulité [n° 1697].
1691. Il dit donc : je dis qu'ils ne croyaient pas en lui, POUR QUE S'ACCOMPLÎT LA PAROLE QUE LE PROPHÈTE ISAÏE AVAIT DITE.
Ici il faut savoir que l'expression « pour que » dans les Saintes Écritures a tantôt un sens causal, comme plus haut : Moi je suis venu pour que mes brebis aient la vie ; tantôt un sens consécutif, et signifie alors un événement futur. Et c'est en ce sens qu'elle est prise ici. En effet ce n'est pas parce qu'Isaïe l'avait prédit qu'ils ne croyaient pas mais c'est parce qu'ils n'allaient pas croire qu'il l'a prédit ; ainsi c'est à partir des non-croyants que la parole d'Isaïe est accomplie - II faut que s'accomplisse tout ce qui est écrit de moi dans la Loi de Moïse, les Prophètes et les Psaumes. - Un seul iota ou un seul point de la Loi ne passera pas que tout ne soit accompli*.
1692. Mais s'il était nécessaire que s'accomplît la parole d'Isaïe, il semble que les Juifs soient excusables de ce qu'ils n'ont pas cru : en effet, ils ne pouvaient aller contre la prophétie.
Je réponds : il faut dire qu'ainsi était prophétisé qu'ils useraient de leur libre arbitre. En effet Dieu, qui connaît par avance les choses futures, a prédit par le prophète leur incrédulité, mais ce n'est pas lui qui en est l'auteurce n'est pas parce qu'il connaît déjà les péchés futurs des hommes que Dieu force quelqu'un à pécher. Ce péché, donc, que les Juifs ont commis, le Seigneur, à qui rien n'est caché, a prédit qu'ils allaient le commettre.
1693. Il ajoute ensuite ce que dit le prophète : SEIGNEUR, QUI A CRU À CE QUI A ÉTÉ ENTENDU DE NOUS, ET LE BRAS DU SEIGNEUR, À QUI A-T-IL ÉTÉ RÉVÉLÉ ?
Il faut savoir ici qu'il y a deux manières de croire. Parfois c'est par l'instruction d'un autre - et c'est là la manière commune de croire - La foi vient de ce qu’on entend, et on entend par la parole du Christ. Parfois par une révélation divine, ce qui est un mode particulier dont l'Apôtre dit : Ce n'est pas non plus d'un homme que je l'ai reçu ou appris, mais par une révélation de Jésus Christ*.
1694. Isaïe a donc prédit que les croyants seraient rares, en disant : SEIGNEUR, QUI A CRU ? Et en premier lieu quant à la manière commune, c'est-à-dire par l'instruction, quand il dit : QUI A CRU À CE QUI A ÉTÉ ENTENDU DE NOUS ? Et ce verset d'Isaïe peut se comprendre de deux façons.
D'une première façon en ce sens : QUI A CRU À CE QUI A ÉTÉ ENTENDU DE NOUS ? à savoir ce que nous avons entendu de toi - Nous avons entendu du Seigneur des armées un message. - J'entendrai ce que dit en moi le Seigneur Dieu. Autrement dit : nous, nous l'avons entendu de toi, mais. Seigneur, qui croira ce que nous avons entendu de ta bouche au sujet de ta nativité et de ta Passion ? C'est aussi pourquoi tout ce chapitre d'Isaïe parle de ces choses.
Or il dit que les prophètes entendent, pour faire comprendre la manière dont les prophètes sont illuminés. En effet, par la vision l'homme reçoit immédiatement une connaissance de la réalité vue, tandis que par l'ouïe la connaissance ne provient pas immédiatement de la réalité vue, mais d'un signe de cette réalité. Donc, parce que les prophètes ne voyaient pas immédiatement l'essence divine mais seulement des signes des réalités divines, il dit qu'ils entendent - Si quelqu'un parmi vous est prophète du Seigneur, je lui apparaîtrai dans une vision ou je lui parlerai en songe, c'est-à-dire par des signes. Or le Fils voit éternellement l'essence divine elle-même - Personne n'a jamais vu Dieu ; le Fils unique qui est dans le sein du Père, lui, l’α fait connaître*. QUI donc A CRU À CE QUI A ÉTÉ ENTENDU DE NOUS ? à savoir : qui a cru ce que nous avons entendu et fait connaître ? - Ce que j'ai entendu du Seigneur des armées, le Dieu d'Israël, je vous l'ai annoncé.
D'une autre façon : QUI A CRU À CE QUI A ÉTÉ ENTENDU DE NOUS ? c'est-à-dire ce qu'ils entendent de nous - Ils entendent mes paroles de ta bouche et ne les observent pas.
1695. Quant au mode particulier de croire, c'est-à-dire par une révélation, il dit : ET LE BRAS DU SEIGNEUR, À QUI A-T-IL ÉTÉ RÉVÉLÉ ? Le Fils est appelé « bras », lui par qui le Père opère toutes choses, comme on appelle bras de l'homme ce par quoi l'homme opère. Et si l'homme opérait par un seul verbe intérieur, alors ce verbe pourrait être appelé son bras. Ainsi donc le Fils est appelé le bras de Dieu, non que Dieu le Père soit déterminé par une figure de chair humaine et qu'il ait un bras corporel, mais parce que Tout a été fait par lui. - Ton bras est-il comme celui de Dieu, et ta voix peut-elle tonner comme la sienne ? - II a déployé la force de son bras.
1696. Notons que cette parole a été l'occasion de l'erreur de Sabellius, qui a dit que le Père et le Fils sont une même personne, et aussi de l'erreur d'Arius, disant que le Fils est moindre que le Père. En effet, un homme et son bras ne forment pas deux personnes mais une seule ; et on ne peut dire que le bras soit égal à l'homme.
Il faut répondre en disant qu'en de telles choses il n'y a pas de similitude suffisante : car ce qui se trouve dans les créatures ne représente pas parfaitement ce qui est en Dieu. C'est pourquoi Denys dit que la théologie symbolique n'est pas argumentative. Le Fils n'est donc pas appelé « bras » comme s'il était la même personne que le Père, ou moins grand que lui, mais parce que par lui le Père opère tout. Il dit donc : ET LE BRAS DU SEIGNEUR, À QUI A-T-IL ÉTÉ RÉVÉLÉ ?, comme s'il disait : à un petit nombre, à savoir aux Apôtres eux-mêmes - Car c'est à nous que Dieu l’α révélé par son Esprit.
1697. Jean cite ensuite la prophétie prédisant la cause de leur incrédulité. Et si nous sommes attentifs à ces paroles de l'Évangéliste, il semble bien, à première vue, qu'elles aient une signification obscure.
D'abord parce que s'il est dit : VOILÀ POURQUOI ILS NE POUVAIENT PAS CROIRE, ce qu'Isaïe a dit, les Juifs semblent être excusables. En effet, quel est le péché de l'homme qui ne fait pas ce qu'il ne peut pas faire ? Et, ce qui est plus grave, on fait retomber la faute sur Dieu, parce qu'IL A AVEUGLÉ LEURS YEUX et leur cœur. Ce serait tolérable si on disait cela du diable, puisque le dieu de ce monde a aveuglé l'esprit des infidèles. Mais ici on dit cela de notre Seigneur ! Car Isaïe dit : Je vis le Seigneur siégeant sur un trône sublime et élevé . Et plus loin : Aveugle le cœur de ce peuple, rends-le dur d'oreille, bouche-lui les yeux, de peur que ses yeux ne voient, que ses oreilles n'entendent, que son cœur ne comprenne, qu'il ne se convertisse et ne soit guéri.
1698. Pour bien comprendre cela, expliquons d'abord ce que dit l'Évangéliste : VOILÀ POURQUOI ILS NE POUVAIENT PAS CROIRE. Il faut savoir que quelque chose est dit impossible ou nécessaire de deux manières : d'une manière absolue et d'une manière relative. D'une manière absolue, comme il est impossible qu'un homme soit un âne ; d'une manière relative, comme il est impossible que je sois à l'extérieur de la maison si je suis à l'intérieur. En fonction de cela, il faut donc dire qu'un homme est excusé s'il ne fait pas les choses qui, d'une manière absolue, lui sont impossibles. Mais s'il ne fait pas celles qui lui sont impossibles d'une manière relative, il n'est pas excusé. Ainsi, si l'on rapporte que quelqu'un a vraiment la mauvaise volonté de voler et qu'il dit qu'il lui est impossible de ne pas pécher tant qu'il a cette volonté, il n'est pas excusé ; parce qu'une impossibilité de cette sorte n'est pas absolue mais relative : en effet il peut abandonner cette mauvaise volonté. Il est donc dit : VOILÀ POURQUOI ILS NE POUVAIENT PAS CROIRE comme s'ils avaient, dans leur malice, une volonté aveuglée - Si l'Éthiopien peut changer sa peau ou le léopard ses taches, alors vous aussi pourrez bien faire, quoique vous ayez appris le mal. - Comment pourriez-vous faire le bien, vous qui êtes mauvais ? Et c'est la même chose que si je disais de quelqu'un : moi, en aucune manière je ne peux l'aimer, mais je l'ai en haine.
Quant à la deuxième partie de la prophétie, il faut savoir que l'aveuglement et l'endurcissement venant de Dieu ne s'entendent pas comme si Dieu suscitait la malice ou qu'il poussait à pécher, mais du fait qu'il n'infuse pas sa grâce, grâce qu'il infuse par sa miséricorde. Mais la raison pour laquelle il ne l'infuse pas provient de nous, en tant qu'il y a en nous quelque chose qui répugne à la grâce divine. Car lui, quant à ce qu'il est lui-même, illumine tout homme venant en ce monde - Il veut que tous les hommes soient sauvés. Mais c'est parce que nous nous détournons de Dieu qu'il nous retire sa grâce - Parce que tu as, toi, rejeté la science, je te rejetterai. - Ta perte, Israël, provient de toi ; en moi seul ton secours. Et c'est comme si quelqu'un avait fermé la fenêtre de sa maison et qu'on lui disait : Tu ne peux pas voir puisque tu es privé de la lumière du solei1. Or ce ne serait pas à cause d'un manque de soleil, mais parce que lui-même se serait coupé de la lumière du solei1. C'est d'une manière semblable qu'on dit ici qu'ils NE POUVAIENT PAS CROIRE parce que Dieu les a aveuglés : c'est qu'en fait eux-mêmes avaient produit la cause de leur aveuglement - Leur malice les a aveuglés.
1699. Après avoir vu cela il faut considérer les paroles de cette prophétie du livre d'Isaïe, non pas en elles-mêmes mais selon leur signification. Dans ces paroles, donc, sont contenues trois choses : premièrement, l'endurcissement et l'aveuglement des Juifs ; deuxièmement, l'effet de l'un ei de l'autre [n° 1701] ; troisièmement, la fin de cet endurcissement et de cet aveuglement [n° 1702].
1700. À propos du premier point, il faul considérer que le Seigneur amenait à la foi de deux manières : par des miracles et par un enseignement ; c'est pourquoi il les reprend sur ces deux points en disant : Si je n’avais fait parmi eux les œuvres que nui autre n'a faites, ils n'auraient pas de péché. Et encore : Si je n’étais pas venu, et que je ne leur avais pas parlé, ils n'auraient pas dé péché, mais maintenant ils n'ont pas d'excuse à leur péché. Ils ont en effet méprisé l'un et l'autre. Donc, parce qu'ils n'étaient pas attentifs aux miracles du Christ avec la ferveur qu'ils auraient dû avoir, il dit : IL A AVEUGLÉ LEURS YEUX, à savoir : les yeux de leur cœur - Puisse-t-il illuminer les yeux de votre cœur pour qu'ils considèrent pai leur intelligence que de tels miracles ne pouvaient être faits si ce n'est par la puissance divine. - Toi qui as vu tant de choses, tu n'y fais pas attention ? Et : Qui est aveugle, sinon mon serviteur ?
Parce qu'ils n'étaient pas impressionnés par l'enseignement du Christ, il ajoute : ET ENDURCI LEUR CŒUR. Ce qui n'est pas dissous par une forte chaleur ni broyé par un coup violent est à l'évidence très dur. Or les paroles du Christ sont comme un feu, et comme un marteau qui brise la pierre, comme il est dit dans Jérémie. Comme du feu, certes, parce qu'elles enflamment par la charité ; comme un marteau, parce qu'elles effraient par la menace et brisent par la très grande évidence de la vérité. Et pourtant le cœur des Juifs n'était pas attentif à la parole du Christ. Aussi il est manifeste qu'il fut endurci - Son cœur est dur comme l'enclume de celui qui manie le marteau*. - II fait miséricorde à qui il veut, et il endurcit qui il veut.
1701. Il montre ensuite l'effet de leur aveuglement lorsqu'il dit : POUR QU'ILS NE VOIENT PAS DE LEURS YEUX, à savoir ceux de l'esprit, en découvrant la divinité du Christ - Elles ont des yeux et ne voient pas.
Au contraire, il est dit dans Luc : Bienheureux les yeux qui voient ce que vous voyez. Il montre l'effet de leur endurcissement lorsqu'il dit : ET NE COMPRENNENT PAS PAR LE CŒUR, sous-entendu : Pour qu'ils NE COMPRENNENT PAS PAR LE CŒUR - Et parce que pas un ne comprend, ils périront à jamais^. - II n'a pas voulu comprendre de façon à bien agir.
Ici, il faut remarquer que l'expression « pour que » n'est pas prise au sens causal mais au sens consécutif.
1702. Puis il indique la fin de cet aveuglement et de cet endurcissement. Et cela peut se comprendre de deux manières, comme le dit Augustin.
D'une première manière, avec la répétition de la négation, le sens serait : QU'ILS NE SE CONVERTISSENT PAS ET QUE JE NE LES GUÉRISSE PAS. En effet, le chemin de la guérison du péché est la conversion à Dieu - Convertis-nous à toi, Seigneur, et nous serons convertis, et il est ajouté aussitôt : Renouvelle nos jours comme autrefois.
Mais à ceux qui se sont montrés indignes de la rémission de leurs péchés, Dieu n'accorde pas les faveurs par lesquelles ils se convertiraient et seraient guéris, puisque manifestement ils ne les acceptent pas mais les rejettent.
D'une autre manière, sans la répétition de la négation, le sens serait : ils ont été aveuglés et endurcis afin que pour un temps ils ne voient ni ne comprennent ; et qu'ainsi, ne voyant ni ne comprenant, c'est-à-dire ne croyant pas dans le Christ, ils le tuent puis, touchés de componction , se convertissent et soient guéris. Car Dieu permet que quelques-uns parfois tombent dans le péché afin qu'humiliés, ils se rétablissent plus fermement dans la justice.
L'une et l'autre de ces explications se retrouvent chez différents Juifs. La première, chez ceux qui sont demeurés jusqu'au bout dans leur refus de croire ; la deuxième, chez ceux qui, après la Passion du Christ, se sont convertis au Christ et qui, pris de componction en leur cœur par les paroles de Pierre, ont dit aux Apôtres : Frères, que devons-nous faire ?
1703. L'Évangéliste montre ensuite que les paroles de l'Écriture citées auparavant tombent à propos. Car Isaïe a vu en même temps la gloire de Dieu et l'aveuglement des Juifs, comme cela apparaît clairement lorsqu'il dit d'abord : Je vis le Seigneur siégeant sur un trône sublime et élevé, puis ajoute : Aveugle le cœur de ce peuple, rends-le dur d'oreille, bouche-lui les yeux, de peur que ses yeux ne voient, que ses oreilles n'entendent, que son cœur ne comprenne, qu'il ne se convertisse et ne soit guéri. Et parce que ce qu'il avait vu convenait pour qu'il rendît témoignage, on trouve ensuite : ET QU'IL A PARLÉ DE LUI, c'est-à-dire du Christ, dont il a vu la gloire : Tous les prophètes rendent de lui ce témoignage. - Dieu avait promis auparavant [l'Évangile] par ses prophètes dans les Saintes Écritures, au sujet de son Fils.
1704. Concernant les deux premières choses que l'on regarde à présent, il faut prendre garde à l'erreur des ariens qui disent que seul le Père est invisible à toute créature, mais que le Fils a été vu dans les visions de l'Ancien Testament. Mais puisqu'il est dit plus loin : Qui me voit, voit aussi le Père, il est manifeste que c'est d'une seule et même manière que le Fils et le Père sont visibles. Donc, en voyant la gloire du Fils, Isaïe a vu aussi la gloire du Père ; et bien plus, de toute la Trinité qui est un seul Dieu siégeant sur un trône élevé et que les séraphins proclamaient : Saint, saint, saint. Non pas de telle sorte qu'Isaïe ait vu l'essence de la Trinité, mais par une vision de l'imagination, avec son intelligence, il a exprimé des signes de sa majesté - Si quelqu'un parmi vous est prophète du Seigneur, je lui parlerai en songe ou dans une vision.
1705. Ce qui est dit ensuite : ET QU'IL A PARLÉ DE LUI exclut l'erreur des manichéens qui ont dit qu'aucune prophétie de l'Ancien Testament n'a annoncé le Christ, comme Augustin le rapporte, et celle de Théodore de Mopsueste qui a dit que toutes les prophéties de l'Ancien Testament ont été dites au sujet d'autre chose mais rattachées au ministère du Christ par les Apôtres et les Évangélistes, grâce à une certaine adaptation, comme ce qui est dit d'un fait peut être appliqué à un autre.
Or tout cela est exclu par ce qui est dit : ET QU'IL A PARLÉ DE LUI, comme le Christ a dit au sujet de Moïse : C'est de moi qu'il a écrit.