Jean 12, 19
Les pharisiens se dirent alors entre eux : « Vous voyez bien que vous n’arrivez à rien : voilà que tout le monde marche derrière lui ! »
Les pharisiens se dirent alors entre eux : « Vous voyez bien que vous n’arrivez à rien : voilà que tout le monde marche derrière lui ! »
Les pharisiens dirent donc. Un autre « donc », bien
différent de celui que nous lisions au v. 17 ; car le contraste est le même qu'un peu plus haut (vv. 9-11). -
Dirent donc entre eux : προς εαυτους, dans le sens de « se dirent l’un à l’autre ». Cf. Bretschneider, Lex.
man. s. v. Les plus violents excitaient les faibles, les indécis, afin d'arriver à une résolution nette et prompte. -
Vous voyez que vous ne gagnez rien. (Θεωρεῖτε, la contemplation de l'expérience). Les meneurs se séparent
ainsi de leurs collègues. Si vous nous aviez écoutés, tout serait terminé depuis longtemps ; mais vos
atermoiements et vos demi-mesures n'aboutissent qu'à rendre la multitude plus favorable à ce Jésus. - Voilà
que tout le monde... Hyperbole dans laquelle éclate toute leur jalousie. Le monde entier, réduit à sa stricte
expression, c'était une portion considérable des Juifs alors réunis à Jérusalem. « Ils prophétisaient sans
savoir », dit fort bien Lampe, car leur parole est devenue littéralement vraie. - Va auprès de lui (derrière lui
comme à la suite d'un chef) (dans le texte grec, au temps passé, car c'est déjà un fait accompli ; la locution est
toute hébraïque, וירחאךלה). Quoique des faits analogues se fussent produits à Jérusalem (Cf. 7, 11 et ss. ; 8,
30 ; 10, 23 et ss. ), jamais encore l'influence du Sauveur n'avait paru aussi entraînante ; les Pharisiens, au
contraire, sentaient la leur s'affaiblir de plus en plus.
Les Juifs le proclamaient roi d'Israël dans un sens conforme à leurs rêves sur la royauté temporelle de leur Messie. Ils espéraient, en effet, voir s'élever du milieu d'eux un roi dont la puissance surpasserait celle des rois de la terre, et qui les affranchirait de la domination des Romains.
Considérez ici l'enchaînement des faits qui amenèrent la passion du Sauveur. Il ressuscita Lazare, réservant ce miracle pour le dernier, et la vue et le bruit de ce miracle déterminèrent nu grand nombre de Juifs à croire en lui : « C'est ainsi que lui rendait témoignage la multitude qui était avec lui, lorsqu'il appela Lazare du tombeau, et le ressuscita d'entre les morts. » C'est pour cela aussi que le peuple vint en foule au-devant de lui, parce qu'il avait appris que Jésus avait fait ce miracle. De là l'envie haineuse et les embûches des pharisiens : « Les pharisiens se dirent donc entre eux : Vous voyez que nous ne gagnons rien, voilà que tout le monde court après lui. »
Ils semblent leur dire : Plus vous cherchez à lui tendre des embûches, plus vous le grandissez, et rendez sa gloire éclatante. Quel fruit donc retirez-vous de tant d'efforts ?
Ce mot est composé d'une abréviation et d'un mot entier, osi veut dire sauvé, et anna est une interjection suppliante. Le mot osi est abrégé, anna est entier, « Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur, » peut être entendu dans ce sens : « Béni soit celui qui vient an nom de Dieu le Père, » bien qu'on puisse aussi l'entendre de son propre nom, puisqu'il est aussi le Seigneur ; mais le sens le plus vraisemblable de ces paroles nous est indiqué par ces autres du Sauveur : « Je suis venu au nom de mon Père. » (Jn 10) Il ne perd pas sa divinité en nous enseignant l'humilité.
Voulez-vous juger du fruit de la prédication du Sauveur et du grand nombre de brebis (parmi celles qui avaient péri de la maison d'Israël), qui avaient entendu la voix du pasteur, considérez ce que dit l'Evangéliste : « Le lendemain, une foule nombreuse qui était venue pour la fête, ayant appris que Jésus venait à Jérusalem, prit des rameaux de palmiers, » etc. Les rameaux de palmier sont les louanges et l'emblème de la victoire que le Seigneur devait remporter sur la mort en mourant lui-même, et du triomphe qu'il devait obtenir par le trophée de la croix sur le démon, le prince de la mort.
Le mot hosanna est une parole de supplication, qui exprime plutôt un sentiment du cœur qu'une pensée déterminée, comme sont les mots qu'on appelle dans la langue latine interjections.
Lorsque Nôtre-Seigneur eut fait éclater la vertu de sa résurrection, ils se souvinrent alors que ces choses étaient écrites de lui, et que ce qu'ils avaient fait à son égard en était l'accomplissement, c'est-à-dire qu'ils n'avaient fait autre chose que ce qui était prédit de lui. »
Qu'était-ce pour le Roi éternel des siècles de devenir le roi des hommes ? Jésus-Christ ne fut pas roi d'Israël pour imposer des tributs, pour lever et armer des troupes, mais pour gouverner les âmes et les conduire dans le royaume des cieux. Si donc il a voulu être roi d'Israël, ce n'est point pour s'élever lui-même, mais par bonté pour nous, c'est un témoignage de sa miséricorde, plutôt qu'une marque de sa puissance ; car celui qui s'est appelé sur la terre le roi des Juifs, est dans le ciel le roi des anges.
Saint Jean ne raconte que d'une manière abrégée ce fait qui se trouve complètement développé dans les autres évangélistes. Ce petit de l'ânesse sur lequel personne encore ne s'était assis, suivant la remarque des autres évangélistes, est la figure du peuple des Gentils qui n'avait pas encore reçu la loi du Seigneur, l'ânesse (puisque l'un et l'autre furent amenés au Seigneur) était le symbole du peuple fidèle qui se forma au milieu du peuple d'Israël.
L'Evangéliste joint au récit de ce fait un oracle prophétique pour faire voir que les princes des Juifs, aveuglés par leur méchanceté, ne comprenaient point que les prophéties qu'ils lisaient s'accomplissaient en Jésus-Christ : « Selon ce qui est écrit : Ne craignez point, fille de Sion, voici votre Roi qui vient, assis sur le petit d'une ânesse. » C'est dans le peuple juif que se trouvait la fille de Sion, la ville de Jérusalem est elle-même cette Sion, à qui il est dit : « Ne craignez point. » Reconnaissez celui qui est l'objet de vos louanges, et ne soyez point effrayée lorsque vous le verrez souffrir, car le sang qui est répandu doit effacer vos crimes et racheter votre vie.
Cette multitude trouble une autre multitude. Mais pourquoi cette multitude aveugle se laisse-t-elle aller à la jalousie ? parce que le monde s'empresse autour de celui par qui le monde a été fait.
La loi ordonnait que le dixième jour de la lune du premier mois, chacun prît un agneau ou un chevreau, et le gardât dans sa maison jusqu'au quatorzième jour de ce mois, au soir duquel on devait l'immoler (Ex 12) ; voilà pourquoi l'Agneau véritable, l'Agneau sans tache, choisi dans tout le troupeau, et qui devait être immolé pour la sanctification du peuple, se rendit à Jérusalem cinq jours avant son immolation, c'est-à-dire, le dixième jour de la lune.
Cette multitude témoignait à haute voix qu'elle voyait eu lui beaucoup plus qu'un prophète : « En effet, dit l'Evangéliste, ils allèrent au-devant de lui, en criant : hosanna, » etc.
En montant sur cet ânon, Nôtre-Seigneur nous enseigne figurativement qu'il doit s'assujettir le peuple immonde des nations, et il accomplit en même temps une prophétie.
Un des plus puissants motifs qui porta la multitude à croire en Jésus-Christ, c'est qu'il n'était pas contraire à Dieu, et ce qui frappait le plus l'esprit du peuple, c'est qu'il disait qu'il venait du Père. De ces paroles nous tirons cette conclusion qu'il était Dieu. En effet, le mot hosanna signifie sauvé. Or, l'Ecriture n'attribue qu'à Dieu la puissance de sauver. Nous concluons encore qu'il était vrai Dieu, parce qu'il vient et qu'il n'est pas conduit par un autre ; car être conduit, indique qu'on est sous la dépendance de quelqu'un tandis que venir soi-même, n'appartient qu'au Maître. Ce qu'ils ajoutent : « Au nom du Seigneur, » exprime la même vérité ; car ils ne disent pas qu'il vient au nom du serviteur, mais « au nom du Seigneur. »
Ou bien encore, comme les rois des Juifs avaient été injustes pour la plupart, et avaient jeté leurs peuples dans des guerres sans fin, le prophète dit ici : Ce roi ne leur est pas semblable, il est plein de douceur et de mansuétude, comme le prouve l'âne qu'il choisit pour monture ; car il n'entre pas à la tête d'une armée, il entre assis sur son ânon.
Leur ignorance venait de ce que Jésus ne leur avait pas révélé qu'il allait accomplir cette prophétie ; car il les eût scandalisés en leur faisant connaître qu'il soumettrait sa royauté à cette humiliation, ils n'eussent point compris tout d'abord quel était le royaume dont il leur parlait, et ils auraient cru qu'il s'agissait d'un royaume temporel.
Le monde ici est pris pour la multitude. Ces paroles, du reste, me paraissent venir de ceux qui étaient animés de bons sentiments à l'égard de Jésus, mais qui n'osaient les faire connaître, et qui s'efforçaient par cette considération de détourner les autres de leur projet comme d'une chose dont l'exécution était impossible.